「A hero who died too young 」(ft. Aemon Dragonknight)

Aemon Chevalier-Dragon avait quitté Meereen bien avant le reste de sa famille car en compagnie de ser Harrold Ouestrelin, il avait parcouru les terres volantaines pour y agir au nom de ses grands-parents avant leur arrivée. Il avait sagement écouté chaque champ du barde qui avait fait la route avec eux et il avait férocement protégé la prêtresse rouge et guérisseuse qui les accompagnait quand bien même sa religion était si éloignée de la sienne. Son devoir passait avant ses croyances.
Il avait aimé chaque instant de ce voyage, lui qui n'avait rien connu d'autre que les Sept Couronnes. Il avait combattu à Dorne, il avait connu l'humiliation et été aux portes de la mort mais jamais cela ne l'avait empêché de protéger les siens, comme son devoir le lui commander. Désormais, il avait l'impression d'accomplir quelque chose de plus grand, de mettre son épée au service d'une noble cause qu'était celle de la reine Rhaenyra et du roi Daemon. Ce n'était pas seulement leurs ambitions qui les motivaient mais le désir de créer un foyer pour leur famille et c'était cela qui comptait le plus aux yeux du Targaryen, protéger les siens.
Volantis était prise désormais et il y avait trouvé sa place parmi la nouvelle Garde Régine, tout du moins, l'équivalent de celle-ci car il fut prévenu qu'elle connaitrait des changements, qu'elle ne serait plus telle que Visenya Targaryen l'avait créé. Dans l'attente de ses changements, Aemon faisait son devoir pour protéger la famille royale dont il faisait partie et travaillait avec le roi Daemon sur la réorganisation des esclaves-soldats de la ville. Lorsqu'il avait demandé à son grand-père si ces hommes resteraient des esclaves à jamais, il lui avait simplement que chaque chose viendrait en son temps et il était le temps d'organiser la maison royale et de rendre leur règne à la fois solide et sans danger. Pour le reste, ils verraient lorsque le moment viendrait et c'était avec cette idée à l'esprit que le prince-chevalier continuait à faire son devoir. Chaque jour, il était proche de ses soldats au visage tatoué et il les traitait comme n'importe quel citoyen libre. Il s'entrainait avec eux comme avec n'importe quel autre homme libre ou esclave.

Aemon était un chevalier redoutable. Malgré sa stature, ses gestes étaient légers et rapides avec une épée à la main. Dans les Sept Couronnes, il n'y avait pas eu meilleur chevalier qu'il ne le fut, disait-on, et son nom avait été synonyme d'honneur et d'héroisme pour bien des générations. S'il était conscient de ses propres capacités, il ne se surestimait pas non plus car comme chaque homme, il avait ses propres failles et faiblesses. Il aurait aimé dire qu'il était un homme bon, qu'il avait toujours suivi les préceptes de la Foi sans jamais y déroger mais ce n'était pas le cas. Sa plus grande faiblesse résidait dans son cœur, il aimait une femme qui ne serait jamais sienne et il n'aurait jamais dû convoiter la femme d'un autre, de son frère. C'était pour cela qu'il avait rejoint la Garde Royale dans un premier temps, pour rester auprès d'elle, auprès de sa belle et douce Nys. Il n'avait jamais eu d'yeux que pour elle et même s'il n'avait jamais rompu son vœu de célibat, combien de fois l'avait-il rêvé ? N'aurait-il pas souhaité que les rumeurs soient véritables et que le jeune Daeron soit son fils ? S'il l'avait été, jamais il ne l'aurait délaissé comme Aegon le fit, jamais il ne l'aurait fait passer au second plan derrière quelques bâtards. Si Naerys avait été son épouse, il ne l'aurait jamais humilié, jamais déshonorée et accusée de traitrise comme l'avait fait son frère. Parfois, Aemon songeait qu'il eut été trop passif, qu'il aurait dû mieux la protéger, mieux prendre soin d'elle mais où s'arrêtait son devoir ? La Garde Royale protégeait la famille royale mais avant tout, le roi. Et il n'avait jamais pu s'opposer à son roi, quand bien même il aurait aimé le faire, défier son frère en duel et lui faire payer chaque insulte envers leur petite sœur. Mais en vérité, le prince n'aurait jamais levé la main sur son ainé non plus, qu'il fut roi ou non. Il en était bien incapable malgré toute la colère qu'il avait envers lui. Il pouvait abattre bien des hommes à la guerre et être redoutable mais jamais il n'aurait osé blesser sa fratrie, ni Aegon, ni Naerys.
Auprès des esclaves-soldats avec qui le Chevalier-Dragon s'entrainait, il apprenait des mouvements et des gestes qu'il connaissait peu car le style de combat n'était pas régi par les codes de la chevalerie. Cependant, il avait combattu à Dorne et sur de nombreux points, certains mouvements lui semblaient proches de ceux des dorniens qui avaient autrefois ôté la vie au roi Daeron I Targaryen, son cousin. Les plus jeunes soldats avaient encore à apprendre cependant. D'un coup de son épée, il désarma le jeune homme qui lâcha son épée, la fit tomber au sol et le chevalier recula d'un pas, abaissant son arme. Il la remit dans son fourreau et vint aider le plus jeune, se plaçant derrière lui, ses mains sur ses bras pour les positionner.

« — Aōha nesh issi tolī nākostōbā. Ōregon aōha egros eglikta. »
(Your arms are weak like that. Hold your sword higher.)

Il lui donna quelques conseils avant de s'éloigner un peu pour l'observer manipuler son arme tranchante. Ce fut durant cette observation qu'il fut interpellé par son oncle, Jacaerys Targaryen désormais. Il ne l'avait jamais connu dans sa vie précédente, jamais son père ou son oncle n'avaient pas parlé de lui, pas plus que sa tante Rhaena et tout ce qu'il savait de lui, il l'avait lu dans les livres. Des livres qui en disaient peu sur qui il était réellement, il savait simplement où il avait vécu, les épreuves qu'il avait traversé et comment il était mort. Lorsqu'il était arrivé à Meereen, il avait appris à le connaitre un peu mieux le jeune prince mais il s'était vu lui refuser sa demande de devenir son écuyer car il n'avait aucune envie de mêler Jace aux conflits qui l'opposaient à son frère Aegon. Il devait régler cela par lui-même, savoir ce que serait sa vie dans ce nouveau monde, dans cette contrée étrangère avant d'envisager un futur.
Aujourd'hui, la voie qu'il empruntait lui semblait plus claire. Il n'hésitait plus et ne vivait plus dans l'incertitude même si sa relation avec Aegon ne s'était guère améliorée et qu'il apprenait à connaitre sa tendre mère, il avait trouvé sa place.

« — Gaomagon gūrēñare. »
(Keep training.)

Il s'adressa une dernière fois à l'esclave-soldat et se tourna entièrement vers le prince héritier, l'une de ses mains reposant le long de son corps et l'autre sur le pommeau de son épée.

« — My prince, you don't bother me. I am entirely at your service. Plus, you are my uncle and I must always have time for my family. »

Autrefois, son père, Viserys Targaryen, deuxième du nom, lui avait peu parlé de sa fratrie perdue. Car en général, son père parlait peu. Il ne fut pas un homme très présent pour ses enfants mais le prince Aemon avait toujours compris qu’il y avait sur ses épaules un lourd fardeau qu’il ne partageait avec nul autre, à l’exception de son frère Aegon lorsqu’il vivait encore. Ainsi le chevalier connaissait peu de choses sur Jacaerys Velaryon, désormais devenu Jacaerys Targaryen. Il savait seulement qu’il était mort en tentant de sauver son père et qu’il fut l’héritier de leur grand-mère avant cela.
Depuis leur première rencontre, celle où le jeune homme lui avait demandé de devenir son écuyer, Aemon l’avait observé de loin lorsqu’il en eut l’occasion. Il y avait en lui une détermination et une ténacité qu’il admirait. Il n’avait cessé de reconsidérer sa demande, il était certainement le genre d’écuyer qu’il aurait apprécié autrefois mais aujourd’hui, en avait-il besoin ? Désormais, il redoutait seulement qu’il ne soit pas un bon modèle pour le jeune homme car il avait ses propres démons et ses colères à vaincre, celles qui lui venaient du passé et qui, pour la plupart, concernait son frère.

« — I do. »

Était-il le plus brave et loyal des hommes ? Il était loyal, oui, il l’avait été envers chacun des rois qu’il avait servi et plus encore envers Aegon, quatrième de son nom, mais brave… Il l’avait été aux yeux de nombreux hommes, il en avait conscience et pourtant, il ne se sentait pas brave. Peut-être aurait-il choisi le terme d’honorable car à ses yeux, l’honneur avait été important, très important. Peut-être trop important.
En revanche, il était vrai qu’il protégeait ceux qu’il aimait. Il protégeait sa famille. Pour cette raison, il avait décidé de se joindre à la garde de sa grand-mère, la reine Rhaenyra. Il connaissait peu ses oncles et ses tantes, il connaissait peu ses grand-parents pour l’heure et à l’exception de quelques uns de son sang, tout le monde lui était inconnu à Volantis. Mais il les défendrait jusqu’à son dernier souffle car il les aimait sans même les connaître. Il défendrait le règne de Rhaenyra Targaryen, première du nom, souveraine de Volantis et de son roi, Daemon Targaryen, premier du nom lui aussi. Ainsi, il se devait aussi de défendre leurs héritiers et n’était-il pas désormais de son devoir à veiller qu’il devienne un combattant hors pair ?
Serait-il le meilleur mentor pour lui ? Il ne doutait pas qu’il puisse lui apprendre à manier l’épée avec aisance, il ne doutait pas qu’il puisse faire de lui un bon combattant mais saurait-il lui apprendre la rigueur, la bravoure et l’honneur quand il n’était pas en paix avec lui-même ? Jacaerys ne croyait pas en son dieu non plus et sa foi jouait un rôle très important dans sa vie qu’il semblait admirer. Et alors, Aemon vint à se demander s’ils ne pouvaient pas s’aider mutuellement. Peut-être pouvait-il entraîner le prince héritier tandis qu’il cherchait la sérénité de son esprit.

« — You won’t take no as an answer, right? »

Le Chevalier-Dragon eut un sourire après avoir entendu les supplications du plus jeune et pourtant, aîné de ses oncles. Il baissa les yeux, observant sa main sur le pommeau de son arme puis un fin soupir s’échappa d’entre ses lèvres, il était résigné.

« — It won’t be easy. And I won’t go easy on you either, le prévenait-il. There will be days you’ll think you can't succeed and you’ll want to give up but you won’t be able to show it or complain about it but if you think you can do it… Then I’ll take you as my squire and train you. »

Jacaerys ne serait pas son premier écuyer, il en avait eu deux par le passé mais aucun n’avait été son oncle, il n’avait partagé aucun lien familial avec ses précédents compagnons.

« — But I’ll teach you differently than your master of arms or your father did. »

De cela, Aemon était certain. Il avait vu son grand-père avec une épée à la main, lorsqu’il entraînait son oncle Aegon et le roi Daemon et lui avaient des méthodes bien différentes. S’il prenait en main la fin de l’apprentissage de l’héritier, il n’abandonnerait pas et il ne le laisserait pas abandonner. Puis, à la fin de cet entraînement, nul doute que le Targaryen pourrait affronter son père en combat. Gagner, il ne pouvait le promettre mais faire de lui un véritable adversaire pour le roi, cela était certain.
En revanche, le Chevalier-Dragon se demandait s'il pourrait réellement faire de son oncle un chevalier car ce titre n'avait pas la moindre valeur, il n'existait pas à Volantis et il ignorait encore ce que les nouveaux souverains avaient l'intention de faire à ce sujet mais de ce qu'il en savait, l'un comme l'autre cherchaient à se détacher des Sept Couronnes et de ses us et coutumes. Il attendait encore que le roi Daemon réorganise les esclaves soldats et qu'ils puissent parler de l'organisation de la protection de la famille royale qu'il assurait pour le moment avec Harrold et les esclaves du mieux qu'il le pouvait tout en ayant conscience que tout changerait sous peu.

« — Would you like to join us during training for today? »

Cela lui permettrait aussi de voir ce qu'il avait appris, d'en apprendre plus sur lui. Car on en apprenait beaucoup sur un homme en le voyant se battre et en observant la manière dont il traitait ses adversaires.

Prendre en main l'entrainement d'un jeune prince, qu'il soit son oncle ou non, n'était pas aisé. En tant que commandant de la Garde Royale, il avait un temps veillé à l'entrainement du jeune Daeron, celui qui deviendrait Daeron II Targaryen par la suite et pour le jeune homme, il avait été plus aisé de s'entraîner avec son oncle qu'avec les autres gardes car ces derniers possédaient des méthodes bien différentes. Cependant, avec les deux écuyers qu'il avait eu à ses côtés, il avait été plus difficile de leur apprendre la discipline après qu'ils eurent grandi avec les maitres d'armes de leur propre maison.

« — I'll teach you how to protect them but you will also learn to be a knight, my prince. Once your training is complete, you'll do whatever you want of my teaching. »

Aemon était un chevalier et un combattant hors-pair, il avait combattu contre Dorne et ses mains étaient tâchées de sang, qu'importe l'honneur ou la noblesse qu'on lui attribuait. Il était doux avec ceux qu'il aimait, honorable mais sans pitié avec leurs ennemis. Pas les siens mais ceux de sa famille, les ennemis de la maison Targaryen. Et parce qu'il était nécessaire que le futur souverain de Volantis sache se battre, il ne ferait pas preuve de tendresse avec lui non plus, pas lors de son entrainement. Il le forcerait à repousser ses limites et sortir de sa zone de confort. Cela était plus que nécessaire s'il voulait pouvoir rivaliser un jour avec le roi Daemon, s'il voulait pouvoir affronter des ennemis plus forts et plus grands que lui.

Lorsqu'il accepta de s'entrainer avec eux, le Chevalier-Dragon prit alors son jeune oncle avec eux pour en apprendre plus sur lui, sur sa manière de tenir son épée, de se tenir avec celle-ci à la main et de faire face à son adversaire. Il prit le temps d'observer et quand ils furent tous trop épuisés pour continuer, le Targaryen libéra les esclaves puis se tourna exclusivement vers l'héritier de Volantis.

« — Meet me here at dawn. We'll start your training. »

Aemon attendit sa confirmation, l'ombre d'un sourire se dessina sur son visage et il laissa Jacaerys Targaryen repartir à ses occupations après lui avoir adressé un ultime signe de tête et lui-même repartit vers le lieu où son devoir l'appelait : auprès de la reine.