Une certaine ferveur l’avait galvanisée depuis son réveil. Tybalt Waters était demandée par la reine en personne, et ce n’était nullement pour une réunion du conseil restreint.Le petit dragon voyait son esprit tourner comme une véritable tempête, tâchant de se demander pourquoi souhaiterait-elle le voir en privé. Jusqu’à aujourd’hui, leurs échanges étaient limités et principalement tournés vers le conseil restreint. Oh, il sentait qu’elle ne lui faisait pas entièrement confiance, qu’elle ne l’appréciait peut-être pas, également. Mais il continuait de faire des efforts.

Tybalt était animé d’une véritable envie de bien faire les choses. Il voulait rendre fier son père, et tous les sacrifices qu’il faisait, tout était tourné vers cette volonté d’être digne de l’amour de son père. Mais les entendait-il, les rumeurs? Avait-il perçu les discussions de ceux qui le pensaient bien naïf cet ouragan. Lui qui voyait son père comme un héros, n’aurait jamais imaginé que sa place ici aurait bien pu dire que son père l’avait à nouveau abandonné. Qu’il lui aurait trouvé cette place ici uniquement dans le but de s’en débarrasser loin de lui.

Comment aurait-il réagi le jour où quelqu’un lui enverrait cette vérité au visage? Son monde s'écroulait-il à nouveau autour de lui? L’ancien tyran était aussi un homme qui avait seulement toujours voulu appartenir à quelque chose. Etre important pour quelqu’un. Mais il se sentait bien ici, à Volantis. Cela semblait presque incroyable. Il était venu ici avec une double mission et finalement il avait trouvé sa place au sein de la cour de Rhaenyra Targaryen. Et s’il ne sentait pas que la reine le respectait, il avait appris à apprécier sa famille. Il était reconnaissant de l’aide que lui apportait Lucerys Targaryen. Il aimait le temps passer auprès de Joffrey qui lui rappelait son propre fils. Il avait une utilité ici, il avait un talent naturel pour ce rôle de maître des chuchoteurs. Alors l'ouragan pouvait être légèrement apaisé, il avait un but dans cette vie. Et il n’avait pas besoin d’un faux royaume pour s’imaginer avoir de l’importance. Que lui manquait-il encore finalement? Un nom. Il détestait toujours cette étiquette de bâtard qui le poursuivait. D’autant plus qu’il essayait de se contrôler pour ne pas tabasser à mort quiconque le traiterait de bâtard. Mais le contrôle n’avait jamais été son fort. Seule Aelion, son dragon, semblait avoir le pouvoir indicible de calmer ses ardeurs.

La journée s’écoulait et cette question demeurait. Pourquoi souhaitait-elle le recevoir? Tybalt espérait secrètement qu’elle accepterait enfin de le légitimer, qu’il puisse enfin parader sous la bannière d’une maison, sa maison. Après une année de dure labeur, il avait prouvé sa valeur. Il n’avait pas lésiné sur les efforts. Il apprenait même à renforcer sa capacité à lire et à écrire. Pour tout dire, Tybalt n’aurait jamais cru fournir autant d’effort, mais il faisait tout ça pour son père. Pour lui-même aussi. Et pour cette reine qu’il servait fièrement. Il aimait avoir une place ici, cela lui donnait l’impression d’avoir une grande famille. Oh bien sûr, il n'exprimait jamais tout cela à voix haute, mais même pour un ancien tyran cruel, tout cela pouvait avoir une importance cruciale. Et s’il plaçait Maegor avant Rhaenyra, il avait tout de la plus grande loyauté pour la reine Targaryenne de Volantis.

L’heure avançait, aussi, Tybalt s’était pressé à rejoindre le palais de Volantis. L’homme avait passé une partie de la journée dans les ruelles de Volantis, récoltant quelques informations fort précieuses pour le pouvoir en place. L’homme était presque diaboliquement efficace pour mater toutes révolutions possibles.Il avait un avantage non négligeable sur les autres membres du conseil. Lui, avait été à leur place. Il savait reconnaître les premiers signes d'insurrections, il savait reconnaître les fauteurs de troubles. Car il avait lui-même connu tout ça. Il s’était élevé dans les ruelles de Culpucier afin de s’élever comme le leader de cette zone infréquentable abandonnée par les plus nobles.

Aussi rapide qu’un boulet de canon, le petit dragon s’était frayé un passage à travers la garde à l’entrée de l’imposant palais. Parcourant à toute vitesse les couloirs, il arriva finalement avec un peu d’avance face à la salle où se tenait habituellement le conseil restreint de la reine. Saluant un garde, il entra pour observer la salle encore vide. Il inspira longuement, le regard vif fixant une chaise au loin. Il se mordilla légèrement la lèvre inférieure avant de passer une main sur sa tempe, affichant une légère trace de sang qui lui restait. Il avait dû faire fasse à plus de résistance qu’il ne s’y attendait en cette douce matinée. Rien qui ne lui avait fait peur, mais il avait dû agir avec dureté et rapidité.Nul n’était mort, bien sûr, mais un homme avait bel et bien subi son courroux pour oser se dresser sur son chemin.

Avançant dans le silence et le calme plat, Tybalt avait rejoint le dos de la chaise qui était la sienne. Il observa les autres chaises vides puis celle de la reine. Il y avait toujours un feu ardent en lui. Une sincère volonté de prouver à tous qu’il pouvait être suffisant, lui aussi. Qu’il pouvait être plus qu’un bâtard sous-éduqué. Plus qu’une arme sans cerveau. Il voulait qu’on le respecte, qu’on le craigne, qu’on reconnaisse qu’ils étaient chanceux de l’avoir là, parmi eux. Qu’il n’ait pas à craindre de pouvoir perdre sa place ici à ce conseil et dans cette grande famille. Oh, si seulement il pouvait voir en lui, tout ce qu’il pouvait bien se jouer derrière l’apparence d’un homme légèrement instable et tourbillonnant sans arrêt. Qu’ils voient à quel point il voulait être respecté et aimé.

Attendant, Tybalt tapotait des doigts sur le dossier de la chaise, toujours debout, le regard tourné vers la chaise de la reine. Mille questions semblaient s’entrechoquer dans son esprit. Il n’avait rien fait de mal, n’est-ce pas? Il fronça légèrement les sourcils à cette idée. Non, non, cela ne pouvait pas être ça. Cela devait être sa demande pour fonder sa propre maison. Il l’espérait sincèrement, ce serait une première pierre de poser pour ses propres desseins. De plus, cette entrevue était une belle opportunité pour l’homme qui avait longuement cherché une raison pour demander une audience auprès de la reine depuis qu’ils avaient tous eu vent de la nouvelle concernant l’odieux meurtre de Visenya Targaryen à Port-Real, sa grand-mère. Il voulait se tenir prêt à rejoindre momentanément son père si ce dernier l’appelait à lui, pour les funérailles ou même pour l’aider ou le soutenir. Il savait qu’il avait besoin de l’autorisation de Rhaenyra pour ça, et avoir son autorisation à l’avance était souhaitable afin de pouvoir partir plus rapidement lorsqu’il recevrait des nouvelles de Maegor directement.

Une porte s’ouvrit bientôt, la reine apparaissant suivie par la lord commandant de la garde royale. Tybalt observa un instant Ser Harrold Ouestrelin qui ne semblait jamais réellement le voir d’un bon œil. Il n’y fit cependant pas trop attention, saluant rapidement la reine comme il se devait, les courbettes passées, il fut le premier à prendre la parole.



Tybalt releva son regard vers elle à cet instant, la tête toujours haute, il avait un profond respect pour elle. Il s’était renseigné sur toute cette histoire de Danse des dragons auprès de quelques personnes et il devait avouer qu’ils avaient tous vécus une sombre période.