⎡souls tied, intertwined by our pride and guilt⎦ft. Daemon Targaryen

JOUR 18, LUNE 4, ANNÉE 875

Sa première vie, puisqu’il semble qu’il y en ait une deuxième et que la mort ne soit pas une fatalité, Rhaenyra de la Maison Targaryen l’a passé à Westeros. Elle est née, a vécu et est morte dans les Sept Couronnes. Elle a aimé, enfanté et pleuré sur ces terres autant qu’elle a haït, condamné et fait la guerre. Jamais auparavant elle n’a quitté ses terres natales car en ce temps, le royaume était sien. Les Targaryen régnaient en maîtres incontestés avec leurs dragons.
Quitter le royaume fut une nécessité pour elle. Les blessures du passé ne disparaîtront jamais entièrement mais elles ne saignent plus aussi abondamment depuis qu’ils sont parti. Meereen puis Volantis, Astapor et Yunkaï furent des lieux de passage autant que Pentos, Myr et Elyria. Une année et demi a suffi à la valyrienne pour contenir l’hémorragie provoquée par les peines d’une autre époque.
Revenir sur le continent ouestrien ne l’effraie pas mais cela ne l’enchante pas pour autant. Elle s’y sent comme une étrangère. Autrefois, elle a naïvement cru que sans leurs dragons, ils étaient comme le reste du monde mais ce fut une erreur. Sans dragon, c’est toujours leur sang qui coule dans leurs veines et avec lui, sûrement un peu de magie. Mais elle a aimé, lorsqu’elle a compris, être à part. Les derniers vestiges d’un monde, d’un empire disparu, qui faisaient d’elle une être précieux et différent. Mais après tout ce qu’elle a vu et tout ce qu’elle a lu, Rhaenyra ne veut plus se trouver ici. Elle ne désire plus que retrouver les siens. La solitude est moins lourde dans un monde où le sang valyrien et l’héritage des Possessions existe encore. Un monde où ils ont leur place, où personne ne semble la questionner. Car les valyriens ont façonné ce monde et ensuite, les Targaryen ont façonné Westeros mais le continent n’a jamais voulu d’eux. Il n’a jamais voulu d’eux et pourtant, des siècles après, c’est la ville qu’ils ont fondé qui reste leur capitale, les routes qu’ils ont tracé qu’ils empruntent, les régions qu’ils ont découpé qui persistent. Il y a, partout dans la vie des ouestriens, une grande hypocrisie qu’elle ne peut plus supporter, qui la dégoûte profondément. Une fausse droiture qui ne lui est plus supportable.

Daelta a porté la reine Rhaenyra jusqu’au Eyrié quelques jours plus tôt. Jamais auparavant, la jeune dragonne n’a connu un si long vol avec sa dragonnière sur son dos mais elle l’a accompli sans difficulté avant de s’envoler librement dans les montagnes du Val en compagnie de Vermillon et Dallax. Jamais auparavant, Rhaenyra n’est venue en ces lieux. Sa mère fut une Arryn, elle eut le soutien de sa cousine Jeyne et du Val durant la guerre incorpora même les couleur de la maison à son propre blason mais jamais elle ne vint en ces lieux. Alors elle les découvrit avec plaisir, laissant ses doigts glisser sur le mur de marbre blanc, veiné de bleu et ses yeux observer la vue sur les montagnes depuis le sommet des tours, tout comme elle a découvert la jeune Rhaenyra, deuxième du nom, ou fait la connaissance des épouses du prince Maegor.
Alys de la Maison Herpivoie fut une compagnie des plus agréables, la reine passa de longues heures en sa compagnie, discutant de leurs filles respectives et des joies de la maternité tout autant que des difficultés ainsi que des risques et douleurs de l'enfantement. Chaque moment avec Alys lui a rappelé qu'elle n'a jamais pu partager cela avec quiconque dans sa vie précédente, et surtout pas avec Alicent. Comme elle aurait aimé avoir une mère ou une amie pour la guider durant les premières lunes après la naissance de Jacaerys. Ou pour la rassurer durant sa grossesse. Alors, elle a offert à Alys de lui écrire si le besoin se faisait ressentir.
Rhaenyra ne peut pas en dire autant sur la seconde épouse du prince. Tyanna de la Tour est une toute autre chose. Le peu de temps que Rhaenyra a passé en sa présence ne fut pas des plus plaisants. Froide et calculatrice, leurs paroles avaient été vides de sens et de véritables sympathies. Faux sourires et fausse politesse, la pentoshie n'avait eu aucun souhait de se trouver en sa compagnie. Pas plus qu'elle n'a semblé vouloir être en présence de l'enfant, quittant la pièce chaque fois que la jeune Rhaenyra s'était mise à pleurer. Pourtant, en certains aspects, Tyanna avait rappelé à Rhaenyra l'épouse de son dernier fils, Larra Rogare, quoi que la compagnie de la lysienne lui est toujours été plus plaisante et malgé son arrogance, elle ne semble jamais exprimée entièrement son ennui comme le fait Tyanna. En s'arrêtant à la petite ressemblance d'attitude avec Larra, la reine aurait pu trouver à apprécier la sorcière mais elle a vite réalisé qu'elle lui trouve plus de points communs avec Mysaria qu'avec sa belle-fille et dès lors, Rhaenyra est devenue déterminée à passer le moins de temps possible avec elle. Les même cheveux noirs, la peau certes plus pâle mais un accent prononcé d’Essos, des mensonges et manipulation comme outils, autrefois un réseau d’espionnage et surtout, les mêmes mains ambitieuses posées sur un prince Targaryen. Alors elle ne ressent qu’une aversion pour la pentoshie et malgré cela, elle n’en dit pas un seul mot, ni à Daemon et encore moins à Maegor.

Hantée par le souvenir de Mysaria, il a fallu à Rhaenyra poser ses mains sur son époux chaque nuit durant leur séjour, des mains possessives qui chassent le passé, qui chassent le souvenir de la prostituée lysienne. L’a-t’il remarqué aussi, cette ressemblance ? Elle n’a rien dit mais sait-il ce qu’elle pense et ce qu’elle ressent quand ses yeux se posent sur Tyanna de la Tour ?
Leur dernière nuit entre ses murs ne fait aucune exception. Ses mains se posent sur Daemon, le touchent et le caressent alors que leurs corps se mêlent jusqu’à l’épuisement. Cependant, elle dort peu depuis leur arrivé, le sommeil est difficile à trouver depuis qu'ils sont revenus à Westeros et lorsque le jour se lève, elle se tient déjà près de la fenêtre, observant le soleil sortir de derrière les hautes montagnes qui entourent les Eyrié. Ils sont si haut dans les ciels que le soleil apparait pour eux avant même que ses rayons ne viennent réchauffer la vallée en contrebas. Il y a quelque chose de satisfaisant à être les premiers de la région à voir l’astre solaire, à sentir sa chaleur sur leur peau. Une chaleur bien plus douce et discrète qu’à Volantis. Une chaleur qui ne brûle pas et à laquelle Rhaenyra a été habituée toute sa vie mais qui semble d'une froideur démesurée désormais.
Finalement, la Targaryenne se détourne de la fenêtre pour se tourner vers le lit où Daemon est encore étendu mais plus endormi. Elle sourit, abandonne les draps qui couvraient son corps quand elle avance vers lui et se glisse à nouveau dans le lit, contre son corps pour l’embrasser, pour profiter encore de ces moments de légèreté que ces derniers jours leur ont offert. Elle effleure une dernière fois sa peau de ses doigts quand il l'attire à elle et elle reste prisonnière de son étreinte plusieurs minutes avant de s'en défaire, appelant à la raison. Il leur faut partir pour Castral Roc dès ce matin, Lord Tyrion III Lannister les y attend avant la tombée de la nuit.

La valyrienne s'habille d'une tunique rouge et noir, tresse ses cheveux d'argent en arrière pour le vol et alors qu'ils sont presque prêts à partir, elle se dirige vers la chambre où se trouve normalement Aegon. Car son fils a souhaité les accompagner, rendre visite à la jeune Aerea avec qui il a avoué avoir échangé des lettres et depuis qu'ils sont arrivés, son fils ne semble pas avoir quitté la compagnie de la jeune princesse et de sa sœur jumelle Rhaella, si bien que Rhaenyra l'a peu vu. Il restera encore un peu avec elles, et avec Maegor, jusqu'à ce qu'elle et Daemon reviennent de Castral Roc. Il semble heureux, c'est la première fois que la mère voit son fils se lier avec d'autres personnes que ses frères et il semble passer de bons moments avec les deux jeunes filles, elle ne désire pas lui arracher cela.
À cette heure matinale, Rhaenyra le trouve dans sa chambre, tout juste éveillé. Elle prend le temps de l'embrasser, de le serrer contre elle et de lui rappeler que s'ils l'attendront à Peyredragon lorsqu'ils auront fini à Castral Roc pour retourner ensemble à Volantis. Elle ne le laissera pas faire le vol seul, refuse qu'il soit seul si longtemps pour l'heure quand il est à dos de dragon. Elle sait que ses peurs sont bien réelles, elle sait qu'il a été traumatisé par la guerre et malgré les désaccords qu'ils ont pu avoir, la mère continue de protéger et veiller sur son fils. Sur chacun de ses fils.
Lorsqu'elle le quitte, Rhaenyra rejoint la cour des Eyrié où Daelta l'attend, elle s'installe sur son dos et prend son envol. Daemon la rejoint avec Vermillon, ils tournent autour des Eyrié quelques fois, comme un au revoir puis s'en vont vers l'ouest. Le vol dure quelques heures, de longues heures et la Targaryenne apprécie de voler par-dessus les montagnes, puis les rivières des Conflans avant d'atteindre les prairies et les collines de l'Ouest. La différence significative de taille et d'âge entre sa jeune dragonne et celui de son époux l'empêche de se lancer dans une course comme ils le firent autrefois car un battement d'ailes de Vermillon propulse ce dernier plus loin que Daelta et elle manque encore d'endurance et de force pour gagner en vitesse et se laisser porter par le vent là où la taille imposante de la bête rouge le ralentit. Un jour, ils le pourront à nouveau mais Daelta est encore si jeune qu'il lui faudra du temps encore.

Le soleil est encore haut dans le ciel, au milieu de l'après-midi, lorsque les dragons se posent à Castral Roc. La dernière fois qu'ils sont venus, ils l'ont fait pour y trouver la jeune Aerea et sont arrivés à cheval mais ce jour-là, ce sont des affaires plus importantes encore qui les amènent ici. Depuis longtemps maintenant, l'Ouest commerce avec l'est et les tensions politiques au sein des Sept Couronnes mettent en danger ces alliances et accords commerciaux. Cependant, des échanges avec l'extérieur serviront autant les souverains de l'Antique Volantis que le suzerain de l'Ouest. Mais où se place-t'il dans ces alliances qui opposent la reine Visenya aux vivants de ce monde ? De loin, Rhaenyra sait que les conflits ont pris une tournure plus sérieuse et dangereuse, elle sait qu'Aegon est dans le coma mais aussi que Hautjardin est aux mains de la défunte Margaery Tyrell et que Accalmie a brûlé et elle ne peut pas dire qu'elle ressent une quelconque peine à cela. La fierté des Baratheon se devait de les mener à leur chute un jour. L'Ouest semble demeurer avec les vivants, cependant.
Lorsque Daemon et elle se présentent devant l'entrée du Roc, on leur ouvre les portes sans hésiter, le suzerain les accueille poliment, humblement semble-t'il puis, il les guide vers ce qui sera leurs appartements durant les prochains jours pour qu'ils puissent s'y rafraichir et Rhaenyra profite de ce temps pour toquer sa tunique avec une longue robe noir, brodée d'un fil argenté représentant de vagues flammes pour la décorer. Elle relâche ses cheveux, laissant une cascade d'argent tomber dans son dos et agrémenté de seulement quelques tresses pour les empêcher de retomber sur son visage et plus que tout, elle se débarrasse autant que possible de l'odeur de dragon qui règne sur elle.

« — What do you think Lord Tyrion has to offer? »

Rhaenyra interroge son époux, alors qu'ils sont encore dans les appartements et qu'elle s'est installée dans un fauteuil, son regard posé sur lui en attendant que vienne l'heure du diner. Elle se demande si Visenya sera furieuse d'apprendre qu'ils commercent avec un homme qui s'est allié à ses ennemis. Cependant, cela ne les concerne en rien. Une part de la valyrienne se tourne encore parfois vers Westeros, cherche encore à savoir ce qui s'y passe mais en réalité, ils ne sont plus concernés. Quelque soit les conflits qui agitent les Sept Couronnes, ils n'ont rien à y faire et c'est désormais le peuple de Volantis dont ils doivent se préoccuper en premier lieu.

« — And what does he want? I took a closer look at last year's crop reports and they were very good, we have many things to offer. »

Prononcer ces mots lui arrachent un sourire alors qu'elle a conscience qu'ils ont désormais un pouvoir entre les mains, une influence sur les commerces de ce monde qu'ils n'ont jamais eu auparavant.

« — While we're here, I'd like to meet again with the other Lord Tyrion. He was Hand to Daenerys Targaryen and I want to hear his opinion about the slaves, he was there when she freed the Bay of the Dragons after all. I remember him being an honest man, a rare quality in this world. »

JOUR 18, LUNE 4, ANNÉE 875

La chambre qui leur est attribuée au sein du Roc est spacieuse et confortable et tandis qu'ils patientent. Alors tandis qu'elle est assise sur le canapé, la reine Rhaenyra s'interroge. Elle se demande ce que le suzerain de ces terres a à leur proposer, ce qu'il a à offrir et surtout, ce qu'il désire. Car tout n'est que politique et échange, rien n'est jamais offert ou fait de bon cœur lorsqu'un suzerain demande à rencontrer la reine d'une contrée étrangère. Tandis qu'elle parle, elle observe Daemon se changer, reste concentrée sur ses paroles malgré son regard qui glisse sur lui. Les années passent, tant d'années se sont écoulées et petit à petit, elles prennent leur dûs sur le corps de son époux, tout comme sur le sien, et malgré cela, il reste le même guerrier aguerri qu'autrefois.

« — Lannister are not what they used to be. Not anymore. »

Elle a vu le Roc, une fois par le passé, dans sa jeunesse lorsque sa mère l'a emmené avec elle en pérégrination mais en ce temps-là, elle se souvient de bien plus de richesse que désormais. Elle se souvient de l'abondance avec laquelle les Lannister ont toujours affiché leur richesse et la manière dont ils lui ont tourné le dos pour s'allier à l'usurpateur également. Elle ne peut pas oublier cela. Cependant, ces Lannister là, ceux d'aujourd'hui, sont différents. Ils sont moins riches et cela semble les rendre plus modestes. Jamais Jason Lannister ne se serait abaissé à lui demander quoi que ce soit, elle aurait dû le faire ployer le genou de force et elle n'y est jamais parvenue, elle est morte avant. Aujourd'hui, voir son descendant avoir besoin d'elle, cela lui apporte une grande satisfaction, une bien plus grande qu'elle ne peut le décrire et le pouvoir qu'elle et Daemon détiennent aujourd'hui, en ayant pris Volantis, est inestimable.
S'ils le désirent, ils peuvent chambouler l'équilibre commercial de ce monde et qui viendra s'opposer à eux ? Quelle armée serait assez courageuse pour s'opposer à une famille de dragonnier entière ? Il suffirait à Daemon et ses enfants de monter sur le dos de leurs dragons pour réduire cette armée en cendres en l'espace de quelques heures. À quel prix cependant ? Combien de fils perdrait-elle à la guerre ? Trop pour qu'elle puisse l'envisager un jour, pour ne pas privilégier la diplomatie.

« — Good. »

La valyrienne hoche un peu la tête tandis qu'il aborde Tyrion, le premier et elle tourne la tête vers lui, trouve son regard et sourit avant de baisser les yeux. L'air qu'il arbore est clair sur ses intentions et elle saisit son bras, se lève à son tour et murmure près de son oreille.

« — No matter how long this diner will last, I know you shall make me forget about it. »

Rhaenyra sourit, malicieuse et insolente tandis qu'ils quittent la chambre pour suivre les gardes qui les escortent. Elle marche, la tête relevée, ses tresses lourdes se mêlant à ses mèches laissées libres et lorsqu'ils arrivent dans le solar, elle hoche à peine la tête pour le saluer, non pas par arrogance mais car sa stature est bien plus élevée que la sienne désormais.

« — Thank you for your welcome. »

Elle lâche le bras de son époux pour s'assoir autour de la table, face à Tyrion III Lannister, à côté de Daemon et elle l'observe minutieusement. Il n'a rien de l'arrogance qu'elle a connu chez les Lannister. Chez Jason Lannister en particulier car Tyland, bien qu'un traitre, fut toujours un peu plus discret mais jamais à s'abaisser, jamais il ne manqua de fierté dans ses souvenirs, pas plus que de résistance lorsqu'elle le fit torturer pour obtenir des réponses, pour savoir où se trouvait l'or de la couronne.

« — I remember your ancestor, Jason Lannister. He was a very proud and arrogant man. »

Un qui fut tué dans les batailles menées par ses partisans, cela, elle ne l'oublie pas non plus.

« — But it was a very long time ago. And you don't seem to share his... Defects. »

La reine conserve un sourire, poli et fixe sur son visage alors qu'elle masque à peine son dédain passé pour les Lannister. Ce n'est pas lui, directement, qu'elle insulte mais par ses mots, elle cherche à savoir à quel point il a besoin du commerce avec Volantis et surtout, s'il ne masque pas une fierté étouffante derrière sa sympathie.

« — Surely, you didn't ask for this meeting only to share a diner. So please, no further courtesies and tell us the reason of our coming. »

JOUR 18, LUNE 4, ANNÉE 875

Les sourires, la légèreté qu'ils partagent est l'une de celle dont elle ne veut pas se passer, celle qu'elle aime et dont elle apprécie chaque instant. Malgré le passage aux Eyrié, le souvenir de Mysaria qui pèse dans son esprit, Rhaenyra se focalise sur le moment présent, sur la rencontre qui s'apprête à avoir lieu avec le Lannister. Car dès qu'elle entre dans la pièce, qu'elle prend place autour de la table et s'adresse au seigneur, elle le fait avec une honnêteté déconcertante et insultante à la foi.

« — Was he truly the most arrogant? »

La reine penche la tête, sa question est à la fois sincère et amusée tandis qu'elle voit le malaise sur son visage qui provoque une certaine satisfaction en elle quand elle sent le pouvoir qu'elle a su lui, juste entre ses doigts. Son regard se tourne brièvement sur Daemon, elle l'observe du coin de l'œil pour remarquer son sourire et elle contient le sien pour écouter Lord Tyrion. La valyrienne reste silencieuse, elle laisse son époux parler brièvement et elle se fait attentive. Le commerce, elle y a songé depuis qu'il les a invité car s'il n'a rien dit, c'est là la seule raison qui peut les mener à une nouvelle rencontre après celle qu'ils ont eu presque deux années auparavant, alors qu'elle était encore brisée par le passé, loin d'être aussi reconstruite qu'elle ne l'est aujourd'hui.
Rhaenyra tourne la tête vers Daemon, leurs regards se rencontrent et elle hoche imperceptiblement la tête pour lui faire savoir qu'elle prend les choses en main. Elle n'est pas venue sans avoir interrogé ses conseillers sur le commerce avec l'extérieur et particulièrement sur celui avec Westeros.

« — My price, Lord Tyrion, isn't different from that of the Triarchs. A tonlieu on every marchandises you bring in our city. That would be enough. »

Elle se saisit de la coupe de vin face à elle, celle qui a été remplie par les servantes et elle la porte à ses lèvres tandis qu'elle réfléchit à la suite. Quelques gorgées du liquide s'écoulent dans sa gorge, elle reconnait le vin de Myr qu'elle a goûté depuis son retour. Les siècles ont changé le goût du vin mais jamais le plaisir qu'il procure.

« — Some changes are to be made in Volantis but to maintain trade is important for both of us. The king and I do not wish to turn our back on the allies we have. »

Sa main se pose contre celle de Daemon alors qu'elle prononce ces mots, comme signe d'unité alors qu'elle l'encourage à poser son couteau pour joindre ses doigts au sien, tendrement. Elle baisse les yeux vers leurs mains, un sourire étire ses lèvres quand elle s'adresse à nouveau au lion de Castral Roc.

« — Are you worried, my lord, about the tensions rising between King's Landing and Queen Visenya? I've heard the realm chose two queens as their rulers. Your queens, is that right? »

JOUR 18, LUNE 4, ANNÉE 875

La politique ennuie Daemon, il n'en a pas la patience mais Rhaenyra l'a. Elle se trouve dans son élément à cet instant, ce qu'elle a fait durant toute sa précédente existence et elle n'oublie pas comment faire, elle n'a pas oublié. Elle n'oublie pas sa fierté, pas plus que le pouvoir qu'elle détient entre ses mains et qui lui permet de rappeler, par son attitude et ces mots, que le Lannister ne lui est pas supérieur, qu'il a besoin d'eux pour continuer à faire fleurir ses finances. Pour autant, elle n'a pas l'intention de cesser le commerce entre Westeros et Volantis car ils en ont besoin, véritable plaque tournante entre l'ouest et l'est mais aussi les Cités Libres et la Mer de Jade, elle ne peut refuser cela car pèse sur eux la pression de maintenir ce commerce avec de nombreuses autres cités s'ils désirent voir l'argent rentrer dans les caisses de la famille royale. Or, mettre fin à certains accords passés pourraient éveiller la crainte ou quelques oppositions et venir mettre en péril l'équilibre qui régit l'Antique Cité Libre.

« — We all are worried about the future. This is why we're having this meeting, isn't it? »

Rhaenyra sourit, elle se sent maitresse de la situation et il y a bien longtemps qu'elle n'a pas eu le sentiment que tout pouvait lui échapper, lui glisser entre les doigts au moins instant et cela est aussi réconfortant que satisfaisant.

« — Be assured that our ancestor's conquest doesn't concern us. It will not change any treaty we may ratify today. »

Qu'il pense que la reine Visenya ait tort ou raison, cela n'a pas d'importance. Ils peuvent certainement s'accorder sur le fait que Volantis a besoin de changement et que contrairement aux Sept Couronnes, celui-ci ne pourra être que bénéfique. Pour Westeros, cela est encore à voir et la souveraine reste loin de tout cela. Elle soutiendra sa maison, elle soutiendra Visenya car elle est son ancêtre, son sang et qu'elle pense sincèrement que les seigneurs des Sept Couronnes ne méritent pas de vivre librement, loin du joug de leur maison qui s'est éteinte il y a bien longtemps pour renaitre de ses cendres. Ils ne méritent pas d'être libre car ces terres leur appartiennent, elles appartient aux Targaryen depuis qu'ils les ont conquis, qu'ils ont bâti tant de choses pour ce royaume que même des siècles après, leur influence se fait encore sentir et cela n'est pas prêt de changer. Seulement, Rhaenyra croit aussi qu'ils sont trop différents, les valyriens et les ouestriens, pour s'entendre et qu'il faut soumettre les seconds pour que les premiers puissent prospérer à nouveau.

« — You guess well, my lord. May I suggest your Maester to write this accord while we enjoy the food here? »

Sa coupe de vin revient contre ses lèvres et lentement, elle retire sa main de celle de son époux pour venir se saisir de ses couverts. Elle pose son verre, prend sa fourchette et elle se met à couper la viande présente dans son assiette avant de relever les yeux vers le suzerain.

« — Tell me, Lord Tyrion, what do you think of your ancestor, the other Lord Tyrion Lannister? Do you trust this man? »

Rhaenyra entame alors la conversation, adressant un court regard à son époux. Il leur faut en savoir un peu plus sur lui avant de le rencontrer à nouveau, de manière plus solennelle et officielle que précédemment, deux années auparavant.

JOUR 18, LUNE 4, ANNÉE 875

Les négociations sont rapides, ils semblent s'accorder sur les mêmes choses, dans leur globalité et ils verront les détails au moment de ratifier l'accord, dans quelques instants. Sur ces derniers, Rhaenyra ne lâchera pas plus qu'elle ne l'a fait à cet instant, elle imposera ces conditions et elle ne doute pas que le lord saura les entendre et les accepter. Aucune d'elles ne viendra le mettre en difficulté dans sa propre région et elle croit que tout cela les servira tout les deux.
Alors dans l'attente du mestre, la souveraine volantaine interroge le maitre des lieux sur son ancêtre, le premier Lord Tyrion Lannister tout en mangeant. Cette interrogation semble le perturber mais elle conserve un sourire sur les lèvres, elle continue de manger imperturbable quand elle l'écoute parler.

« — A generous man with the young princess, commente-t'elle alors qu'elle pense à Aegon qu'ils ont laissé de l'autre côté du continent avec cette même jeune femme mais elle s'abstient de tout commentaire à ce sujet car révéler que son fils l'apprécie, c'est révéler à un homme qu'elle connait très peu quelques faiblesses au sein de leur famille et cela n'est pas ce qu'elle désire. »

L'intervention de son oncle-époux la pousse à tourner la tête vers lui et il a raison, ils entendent peu parler de lui au milieu des conflits qui agitent les Sept Couronnes. Malgré qu'ils en soient parti, Rhaenyra garde un œil sur ce qu'il s'y passe et s'informe, notamment auprès du Prince Maegor, sur les évènements importants qui se déroulent ici. Mais les explications du Lannister sont claires, valables et la font ricaner au même titre que Daemon.

« — I read once he was fond of... Women in his youth. »

Pour ne pas dire de putains.

« — A liking my husband used to share. »

La valyrienne plaisante, son sourire sur ses lèvres alors qu'elle tourne très brièvement la tête vers son oncle, qu'elle croise son regard malicieusement et elle ne doute pas qu'il lui fera payer cet affront quand ils seront seuls.

« — Lord Tyrion helped my descendant, Queen Daenerys. I'd like to meet him again, to ask him some advices and his opinions. »

Ces intentions vont plus loin, elles pourraient peut-être déplaire au seigneur de ces terres et surtout, elles ne le regardent pas alors elle donne une réponse qui satisfera sa curiosité sans qu'elle ne lui donne trop d'informations.
Et comme pour l'empêcher de la questionner davantage, le mestre arrive enfin. Rhaenyra, Daemon et le lion de Castral Roc mangent tout autant qu'ils ratifient l'accord, discutent des détails et le diner s'éternise bien plus qu'elle ne l'aurait voulu durant une bonne heure de plus jusqu'à ce qu'elle appose sa signature au-bas des deux versions des deux accords identiques, Tyrion ajoute la sienne et Daemon se joint à elle et ajoute sa signature. Et puisque le dessert est déjà consommé, la reine ne s'attarde pas davantage, prétextant une certaine fatigue du voyage pour mettre fin à cette rencontre.

« — I hope this treaty will benefice both our lands. We will see you tomorrow. Thank you for everything. »

Sur ces mots, elle quitte la table, la pièce, avec son oncle-époux près d'elle et ils sont escortés vers leur appartements par les gardes. Alors elle se fait silencieuse jusqu'à ce qu'ils soient dans l'intimité de la chambre.

« — What do you think about Lord Tyrion? I feared I'd push him to far for a moment but we have everything we wanted in the end. »

Alors qu'elle prononce cess mots, elle s'assoit sur le bord d'un fauteuil, rassemble ses tresses sur son épaule et entame de les défaire pour ensuite, se délester de ses vêtements et mettre sa chemise de nuit. Seulement si elle n'est pas interrompue dans ses actes. Mais pour l'instant, ces doigts glissent seulement dans ses cheveux pour les relâcher.

« — He spoke highly of the other Tyrion. His ancestor might be of real help in Volantis. »