⎡a misty memory and a haunting face⎦ft. Visenya Targaryen

Une profonde inspiration et l'air vint envahir ses poumons tandis que ses bras retombaient le long de son corps au moment où la porte de Peyredragon se fermait bruyamment dans son dos. Ses yeux, l’un d’un bleu profond et l’autre d’un vert brillant, voguaient sur le hall qui l’entourait. Elle était venue à Peyredragon en de nombreuses occasions et l’une d’elle l’avait conduite à sa mort. Elle était morte entre ses murs parce qu’elle s’était montrée trop téméraire, que ses doigts avaient effleuré ceux d’une ombre, d’un homme qui n’était pas vraiment présent et cela l’avait tué sans que personne ne s’en rende compte. Il avait fallu plus d’une journée à quelqu’un pour la trouver, étendue sur le sol de ses appartements et sans vie.
Le vieil avant-poste valyrien ne lui faisait pas peur pour autant. Chaque fois que ses doigts effleuraient la pierre noire, l'obsidienne que les valyriens avaient su modeler à leurs désirs grâce à la magie, elle avait l'impression que la sentir respirer. L'endroit portait encore une aura magique mais sombre qu'elle avait toujours su apprécier à sa juste valeur bien que sa demeure, sa place, avait toujours été à Port-Réal. Ses pas résonnèrent contre la pierre, chaque mouvement faisait se mouvoir contre ses courbes le tissu de sa robe aux couleurs crèmes et bleus tandis que ses cheveux d'argent tombaient dans son dos jusqu'à sa taille et volaient à mesure qu'elle marchait. Elle sentait les tresses auxquelles elle avait généreusement noué quelques attaches d'argent et quelques coquillages, se balancer derrière elle.

Entre ses murs, les Targaryen s'amassaient et Shaïra avait toujours été fidèle à la famille dans laquelle elle était née et avait grandi. Elle n'était pas Targaryen par le nom et elle ne s'était jamais considérée comme une princesse de leur sang mais elle avait joui avec plaisir des mêmes privilèges sans les devoirs et les obligations que cela impliquait. Certains disaient que la position d'un bâtard n'était pas enviable mais elle n'enviait pas plus celle des princes et des princesses qu'elle avait vu grandir entre les murs du Donjon Rouge et dont le destin avait été scellé à un jeune âge par un mariage non désiré. Elle était libre, libre de ses choix et de ses partenaires, elle l'avait toujours été et elle ne croit pas qu'un mariage aurait pu changer cela. Alors elle s'était entêtée à ne pas se marier, pour n'appartenir à aucun homme plus qu'à un autre. Elle était libre de les laisser entrer dans sa vie et de les en chasser quand bon lui semblait, quand elle se lassait d'une relation ou d'une autre. Elle prenait plaisir à séduire, à être le centre de l'attention de ces seigneurs mais lorsque le jeu de séduction prenait fin, il apparaissait vite qu'elle perdait tout intérêt pour la plupart des hommes. Il y avait eu quelques exceptions et la plus notable, celle qu'elle ne pouvait oublier, fut son demi-frère. Brynden Rivers était resté un homme passionnant, elle avait toujours préféré l'avoir près d'elle que loin et avouait sans honte qu'il avait tenu une place particulière dans son cœur.
Dans cette nouvelle vie, la bâtarde ne changeait pas. Elle ne voulait pas être différente de celle qu'elle avait été. Érudite et séductrice était certainement les deux adjectifs qui la qualifiaient le mieux. On disait que lorsqu'il avait été Main du Roi et Maître des Chuchoteurs, Lord Bloodraven avait eu mille et un œil et elle avait toujours tiré une fierté de se dire qu'elle était au moins la moitié d'entre eux. Dans les arts magiques résidaient ses capacités, elle s'était toujours appliquée à ce que peu puissent être capable de dire si elle était réellement une sorcière ou non, elle-même s'était employée à ne pas utiliser ce terme. Elle, tout comme Sereneï avant, n'avait rien d'une sorcière comme on l'entendait, le terme sonnait de manière péjorative et ne lui plaisait pas.
Shaïra gravissait les escaliers, sa main appuyée contre le mur qui semblait prendre vie à son passage et la Tour Tambour vibrait au rythme du vent qui frappait l'île. On lui avait soufflé, à son arrivée, que la Salle de la Table Peinte avait changé d'emplacement, qu'elle se trouvait au sommet de la tour et que là-bas, elle y trouverait la reine Targaryenne, celle qui voulait reprendre les Sept Couronnes sous son règne. Autrefois, l'Astre des Mers avait soutenu la Maison du Dragon face aux rébellions de la Maison Feunoyr et aujourd'hui, elle ferait de même. Elle soutiendrait les Targaryen face au reste du royaume. Ce royaume, ils l'avaient bâti et il leur revenait de droit, même s'ils avaient disparu depuis des siècles. Ce qui était mort pouvait renaitre, ce qui n'était plus pouvait être à nouveau, elle le savait mieux que quiconque.

« — Your Grace? »

Sa voix mélodieuse résonna entre les murs de la pièce après qu'elle ait pénétré, la porte laissée ouverte tandis qu'au bout de la Table Peinte qu'elle connaissait bien mais que les années semblaient avoir entamé, se tenait la reine Visenya de la Maison Targaryen dans toute sa splendeur. Elle s'avança encore un peu, ses doigts longs et fins s'enroulèrent élégamment autour de sa robe et elle fit une gracieuse révérence mais quand elle se redressa, ce fut avec fierté et un sourire étirant son faciès.

« — I'm Shiera Seaster, natural daughter of King Aegon, fourth of his name. I've heard about your ambitions to conquer the Seven Kingdoms again and I've come to offer my help. »

Elle tendit la main vers le bois de la table, en effleura les formes des domaines et des noms qui y étaient gravés. Ses yeux suivaient son propre mouvement.

« — I helped House Targaryen against four rebellions. I believe I may be of some use. »

Quand la belle bâtarde releva ses yeux dépareillés sur la reine, elle fut forcée de constater qu'elle était belle, qu'elle dégageait une prestance qu'elle n'avait jamais vu chez une reine. Elle était née sous le règne d'Aegon IV Targaryen mais en ce temps-là, la reine était morte. Elle avait connu le règne de son demi-frère, Daeron II et son épouse, Mariah Martell qui, bien que très belle, n'avait jamais possédé les traits valyriens qu'avait Visenya. Pas plus que les reines qui avaient suivi sour les règnes successifs d'Aerys I, Maekar I et Aegon V. Malgré tout, elle ne se montrait pas intimidée. Confiante et plus assurée que ne l'était bien des femmes, elle se déplaçait avec aisance dans la pièce pour s'approcher toujours plus de la Targaryenne.

« — I've read you and I are both familiar with the art of magic. But you cannot be everywhere at once. Let me be your eyes and ears as I was once for other kings. »

Quelles raisons avaient Visenya de la croire et de lui faire confiance ? Aucune, au premier abord. Shaïra en était bien consciente mais elle ne venait pas les mains vides, elle portait avec elle quelques informations qui viendraient assurer sa loyauté et son efficacité à la reine qu'elle désirait servir. Avant tout, elle se devait d'avoir son attention avec cette offre osée et inattendue.