push you out, then pull you close
I promise you're enough. I promise you. You're enough. These little words, somehow they're changing us. You're enough. So we let our shadows fall away like dust.
Aliénor sentait l’impatience brûler son esprit et son corps. Bientôt, et sur sa demande, sa sœur viendrait à VilleVieille. De nouveau, et comme lorsqu’elles étaient enfants, elles seraient réunies – mais la douce Lady n’avait plus le courage d’attendre après son arrivée. Elle voulait si désespérément retrouver sa merveilleuse Antoinette et la serrer tout contre elle ! Sa présence lui manquait, son rire – qui était si rare – également. De sa jumelle, son adorée Antoinette, elle aimait absolument tout. Et Aliénor ne supportait plus de vivre loin d’elle – elle le faisait depuis bien trop longtemps. Sur les ordres de leur Seigneur et père, sa jumelle partait pour Dorne et avant cela : il s’entêtait à les tenir à l’écart – l’une de l’autre. Cette situation lui était insupportable et pour autant, Aliénor ne disait rien. Elle était bien éduquée, mais plus encore, elle n’avait pas le caractère de la sublime Antoinette. La future Dame de Cordial, elle, n’osait tenir tête à Lyonel Corbray. Alors, elle œuvrait en secret. Combien de fois mentait-elle à son père ? Pour rejoindre son aîné, pour côtoyer son garçon d’écurie ou parce qu’elle se s'ennuyait de la présence de sa moitié. Le Seigneur de Cordial vantait les qualités de sa première fille, expliquait à autrui ô combien elle était parfaite – quand elle n’était qu’une menteuse et une tricheuse. Elle détestait cette existence imposée, elle haïssait cette obligation à être exemplaire. Ce que désirait Aliénor, plus que tout, c’était être comme son Antoinette. Elle aspirait à être libre ! Elle souhaitait exprimer haut et fort ses opinions ! La Lady était lasse de sourire, d’être heureuse lorsqu’elle voulait hurler – que ce soit de rage ou de tristesse. Elle se sentait fausse, tellement fausse que sa seule réalité était sa précieuse jumelle.
La demoiselle ne tenait plus en place. On lui annonçait l’arrivée d’Antoinette dans deux jours et Aliénor ne savait comment occuper son esprit. En réalité, elle savait ! – mais elle n’osait pas. Que dirait Trystan, si elle quémandait après l’enseignement à l’art du combat ? Ou si elle empruntait un arc, alors qu'elle affirmait que les petits gens de Cordial exagéraient ses compétences – lors du tournoi en l'honneur de la Reine Fléaufort et du Lord Royce – ? Et Dyanne ? Ô, Dyanne serait si déçue de savoir que l’épouse de son fils n’était pas délicate. Qu’elle n’était pas ce que l’on attendait d’elle – ce que son Seigneur et père quémandait d’elle. Sûrement pouvait-elle prendre un livre, mais l’impatience faisait de son cerveau une petite chose fumante. Aliénor ne pouvait se concentrer : elle voulait bouger et forcer son esprit à d’autres pensées. Alors, elle trouvait la solution idéale ! L’équitation n’était pas vulgaire pour une Lady et future Dame. Cependant, elle s’accordait rarement le privilège de cette activité – parce que Ben. Les chevaux la renvoyaient à son amour perdu. Et ces pensées, elles, elles étaient indécentes pour une épouse. Mais Aliénor devait tuer le temps, autrement qu’en se morfondant sur l’absence de sa sœur et son arrivée lointaine – ces deux jours qui lui semblaient insurmontables. La Lady, et Dame Consort du Bief, était donc partie à dos de cheval et sur les chemins peu fréquentés de VilleVieille. Évidemment suivie par sa garde personnelle, parce qu’elle n’avait guère le droit d’être seule. Habituellement peu mesquine ou taquine – parce qu’elle ne le pouvait pas réellement – , Aliénor s’était amusée à semer ses deux suivants. Et en les retrouvant, plus qu’eux ne l’avaient pas fait, elle riait. À cet instant, ils observaient une facette que la Lady n’offrait que trop peu – toujours parce qu’elle pensait ne pas en avoir le droit. Être malicieuse n’allait guère de paire avec la perfection. La Corbray devinait qu'ils se savaient comment réagir – s'ils devaient rire de ce jeu ou être gênés, parce qu'elle rendait plus complexe leur mission. Alors, pour trancher, elle proposait tout simplement de rentrer pour Grand-Tour.
Sur le retour, Aliénor se demandait comme s’occuper ensuite. Il y avait déjà fort longtemps qu’elle était partie, elle ne pouvait donc pas s’absente de nouveau. Sûrement irait-elle choisir un ouvrage à étudier jusqu’à l’heure du dîner. Ou peut-être devait-elle partir à la recherche de Trystan ? Dans l'espoir de passer du temps en sa compagnie. Seulement, rien ne lui semblait plus pressé que de prendre un bain – parce qu'elle était l'épouse du Suzerain et maître lieux. Elle ne pouvait, décemment, se présenter décoiffée ou mal odorante à la table du repas. Quoique l'odeur n'était pas un réel problème pour elle, Aliénor savait que son avis n'était pas celui de tous. Ainsi donc, la Lady descendait de sa monture et rejoignait Grand-Tour et ses appartements personnels.
— Antoinette ! s’écriait-elle.
La surprise d’Aliénor était grande ! – alors, qu’à peine les portes de ses appartements ouvertes, elle reconnaissait sa jumelle. Leur visage étaient les mêmes, parce qu'elles étaient de parfaites copies – physiquement. Et si l'étonnement maintenait la future Dame de Cordial sur place, Antoinette parcourait la distance entre elles pour lui offrir une étreinte. Aliénor acceptait cette dernière, avec adoration et amour, et refermait les bras autour de sa précieuse, de sa merveilleuse, soeur. Cette dernière prenait une distance, peu après, et la brune ne pouvait retenir un rire à sa remarque.
— N’aimes-tu pas ce parfum ? quémandait-elle avec amusement.
L'aînée de jumelle inclinait le visage, une moue adorablement malicieuse sur le minois et une étincelle rieuse dans les yeux. Ô, la douce Lady était si heureuse de revoir sa soeur ! De retrouver sa jumelle, sa moitié. Et rapidement, elle faisait un pas dans ses appartements pour refermer les portes derrière elle – offrant une intimité et une tranquillité nouvelles à leur deux âmes.
— Veux-tu bien m’aider à quitter ma tenue ?
Aliénor faisait volte-face, à peine la question posée, avant de récupérer l'amas de ses cheveux corbeaux et les placer sur son épaule. Du coin de l'oeil, elle observait son Antoinette – avec attention et admiration. Peut-être, aussi, parce qu'elle craignait de la voir partir à nouveau. Ô, elle ne voulait vivre à nouveau loin de sa soeur adorée – parce qu'elle se sentait soudain complète, avec son Antoinette à ses côtés.
— Dorne et sa Princesse vont te regretter, mais je suis si heureuse de te savoir ici et avec moi. Je veux tout savoir de toi et de ta vie là-bas ! Ainsi que des merveilles qui peuplent Dorne.
by CrimsonTulip