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Scénarios attendus
Lune 12, 875 AC. L'été arrive sur Westeros et avec lui, la promesse de réclotes prospères. À Port-Réal, l'humeur n'est pourtant pas aux réjouissances après le meurtre de la souveraine des Sept Couronnes. Tous s'agitent et cherchent un coupable, prêt à accuser son voisin pour s'innocenter.
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When it All Falls Down ft. Robert Baratheon

Stannis Baratheon

Stannis Baratheon

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When it All Falls Down

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A good act does not wash out the bad, nor a bad the good



L’accalmie se tenait devant lui, fière et imposante comme il l’avait connu jadis. Cette vision le renvoyait pourtant un peu plus au fait qu’il avait été amené à trahir tout ceux qu’il avait un jour aimé. Tout pour suivre ce destin que l’on lui avait prêté, pour satisfaire ce devoir.

Aujourd’hui, plus que jamais, il pouvait uniquement se rendre compte que les dieux l’avaient à nouveau abandonné, avaient à nouveau prouvé être seulement cruel. Comme il l’avait cru dès sa plus tendre enfance. Oh, que ferait-il s’il faisait une nouvelle fois face à Mélisandre, la prêtresse rouge ? Il n’hésiterait plus à la tuer, à faire taire ses illusions, ses mensonges.

Le destin s’était à nouveau joué de lui en posant Gendry Baratheon sur son chemin pour la citadelle. Était-ce une sorte d’étape obligatoire ? De purgatoire pour ses erreurs passées ? Il n’avait pas pour but d’effacer ses erreurs, il avait toujours vécu avec la ferme idée que l’on ne pouvait pas faire oublier ses erreurs, on pouvait seulement essayer de se racheter après avoir payé pour ces erreurs.

Il était encore debout lorsqu’il avait fini par atteindre le fief ancestral de sa famille. Stannis avait été conforme à son caractère en apparaissant aussi stoïque que possible. Il était pourtant aisé de voir dans son regard, un homme actuellement brisé. Pourtant, il n’abandonnait pas, il était là. Il s’était présenté, révélant enfin sa vraie identité dans ce nouveau monde.

Sans perdre de temps, Stannis avait fait mander son frère aîné, Robert Baratheon. Évidemment, il n’était pas disponible. Il commanda cependant à un garde d’aller le chercher, de lui dire que son frère était de retour. Il avait brièvement hésité avant d’ajouter une seule autre consigne au garde. Qu’il dise à Robert de venir le retrouver dans la forêt pour une partie de chasse au vol. L’idée avait pu lui apparaître lorsqu’il avait croisé Gendry au cœur la forêt. Juste quelques secondes avant l’apparition de son neveu, il l’avait entendu. Les cris d’un autour. Il n’avait pas précisé où dans la forêt, Robert saurait où le trouver, il n’en doutait nullement.

Ses pas étaient alourdis par sa conscience tandis qu’il regagnait sa monture pour se rendre jusqu’aux bois qu’il avait tant connus dans son enfance. Pourquoi avait-il choisi de venir ici pour confronter son frère ? Il n’en était pas certain, mais cela lui avait semblé mieux que cette citadelle. Ce lieu qui, un jour, aurait dû lui revenir, mais avait été confié à Renly à la place. Ce lieu serait plus neutre, rappelait une enfance où ils avaient été unis.

Chevauchant sans halte, il arriva dans une zone de la forêt qu’ils avaient utilisée comme départ de chasse. Il cherchait cependant autre chose, cet endroit était également celui où il s’était arrêté plusieurs heures plus tôt. Tendant l’oreille, il plissa les yeux alors qu’il quittait sa monture pour rejoindre la terre ferme. Il marcha au milieu des arbres, fermant brièvement les yeux.

Il était mort dans un endroit semblable à celui-ci, à l’exception que la neige le recouvrait à cette époque où il avait rendu son dernier souffle. Ce poids semblait toujours plus imposant. Il fronçait les sourcils, contractait la mâchoire.

Qu’espérait-il de cette rencontre ?

Son attention fut retrouvée lorsqu’il entendit à nouveau le bruit distinctif d'un autour. Il s’approcha, la tête relevée pour voir le rapace, petit, qui se tenait sur une branche d’un arbre. Il lui rappelait fière-aile, l’autour qu’il avait recueilli et soigné lorsqu’il était encore un enfant. Il siffla faiblement après l’oiseau pour l’appeler jusqu’à lui.

L’espace d’un instant, son cœur se serra dans sa poitrine. Shireen. Il n’avait pas su la protéger, il l’avait amené à sa mort de la pire des manières.

Quel était son destin à présent ? Son but ?

Il grinça légèrement des dents tout en tentant de chasser ces pensées. Ce n’était pas le bon moment pour laisser cette noirceur prendre le dessus. Il avait toujours aisément sombré dans les limbes de la dépression. Pourtant, il avait également été capable de ne jamais baisser les bras, de ne jamais abandonner même lorsque tout semblait perdu. Qu’est-ce qui était différent ici ?

Cette question le hantait depuis que l’on l’avait ramené. Il espérait toujours trouver un sens à cette nouvelle vie. Il voulait retrouver son devoir pour sa famille, sa maison. Tenter de racheter ses erreurs, sans jamais les oublier. Il n’aurait pas pu les oublier. Il devait apprendre à vivre avec ses souvenirs. Il devait juste voir plus loin, réussir à voir au-delà de cette dépression qui le brisait.

L’autour avait fini par l’approcher, se posant sur le bras qu’il avait étendu. Il l’observait avec attention, cherchant à voir s’il était blessé. Il croisa le regard de l’animal à cet instant, soutenant son regard sans mal. Même brisé, il restait un homme droit et fier. L’oiseau s’envola bientôt jusqu’à une branche plus loin, alors que derrière lui, un homme approchait.

Robert.

Stannis Baratheon inspira longuement avant de se tourner lentement vers celui qui avait été son frère aîné, son roi. L’homme qu’il avait admiré, l’homme qui l’avait blessé en ne le respectant pas à sa juste valeur, en ne l’aimant pas comme un frère. C’était ce qu’il pensait du moins. Et il avait lui-même pu croire qu’il en était venu à ne pas l’aimer non plus. Pourtant, alors qu’il approchait de sa mort, il en était venu à cette réalisation. Il avait aimé son frère.

Mais à la fin, il avait tout perdu. Il regrettait beaucoup de choses, mais il ne regrettait pas d’avoir pris ses responsabilités à la mort de son frère. Il avait poursuivi son devoir envers son frère, envers le royaume. Il avait toujours été prêt à sacrifier sa propre vie pour le royaume. Il ne regrettait pas ça, il regrettait le reste.

Et pour l’heure, il faisait face à son frère aîné qui avait retrouvé toute sa jeunesse.

Stannis était à son image, stoïque et aussi droit que possible. Le poids sur ses épaules ne se laissait pas aisément voir, seulement à travers ce regard éteint. Quelque part, il aurait pu être heureux de revoir son frère, mais il savait qu’il devait attendre son jugement. Et il n’avait jamais été du genre à tenter de se soustraire à son destin ou son jugement.

« Robert »

ft.  @Robert Baratheon


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« Votre frère est là. Il vous fait mander. »

Ce sont des mots que Robert redoute d’entendre depuis son retour à la vie, dans une attente pénible. N’ayant pour l’instant jamais croisé le traître visage de ses cadets ni même ouï la moindre rumeur l’alertant d’une possibilité qu’ils puissent avoir été ressuscités, il avait naïvement pensé que les Fidèles de Trios ne s’étaient tout simplement pas intéressés à ces deux traîtres opportunistes et que dans cette vie, il était libéré de leur présence. Alors le fait que ce domestique se présente à lui, mal à l’aise sur ses deux pieds pour lui annoncer cette nouvelle, le surprend sans qu’il ne sache quoi ressentir d’autre. Il était sur le point de partir à la chasse comme tous les après-midis, peut-être avec Elenda, sa main s’apprêtant à saisir un bel autour à tête grise pour l’y accompagner. Le domestique attendait nerveusement une réponse, Robert contracta sa mâchoire sous le coup de l’irritation. Il ne voulait voir aucun de ses deux frangins et pourtant il fallait que cette confrontation ait lieu. Il ne pouvait pas les laisser s’en tirer comme ça après ce qu’il avait lu sur la Guerre des Cinq Rois.

« A-t-il décliné son identité ? J’ai deux frères.
- Il s’est présenté en tant que Lord Stannis. »


Et, oh.
Son sang ne fit qu’un tour.

« Et de quel droit ose-t-il me faire mander comme un serviteur ? Attendez que je le rosse un coup, ça lui rappellera où est sa place.
- Il souhaite également se rendre à la chasse de l’après-midi avec vous »
, ajouta le domestique, qui semblait désormais inquiet pour ce qu’il allait advenir du pauvre Stannis dans un futur proche.

Robert se contenta de répondre par un rire, cette fois. Son cheval était déjà préparé, repus du sac de graines supplémentaire qu’il avait ingurgité hier soir dans l’optique d’être monté pour de longues courses le lendemain. Robert se hissa sur le grand étalon couleur ébène, vérifiant que ses poches étaient bien accrochées à la selle. L’autour était sagement posé sur son bras coiffé d’un gant de fauconnier, les serres fermement enfoncées dans le vieux cuir, sa petite tête dissimulée par un cache. Le rapace, en revanche, n’avait pas encore mangé et si Stannis était un mulot, il lui ferait ingurgiter jusqu’au dernier os de son crâne. Mais à priori, les conventions voulaient qu’il écoute la version de l’histoire de son petit frère avant de s’en prendre à lui. Quelle perte de temps !

Il n’était pas un type rancunier, ni même facilement colérique, mais cela le brisait de savoir qu’après sa mort, sa propre famille, sa chair et son sang, l’avait trahi. Il savait bien qu’il y aurait des opportunistes, surtout parmi les Lannister et ces perfides Greyjoy. Mais par les Sept, il avait rédigé son testament avant de rendre l’âme et sa volonté était claire comme de l’eau de roche ! Personne n’avait donc pris la peine de le lire ? Ned Stark devait être le régent jusqu’à ce que son fils Joffrey soit apte à régner. Stannis et Renly n’avaient pas à interférer, et encore moins fragiliser leur famille en se battant entre eux jusqu’à la mort en emportant dans leur sillage tout ce que Robert avait contribué à construire, ce royaume enrichi par treize années de paix. Que lui voulait Stannis au juste ? Espérait-il que l’amour fraternel serait suffisant pour obtenir le pardon ?

L’autour piailla soudainement et étendit ses belles ailes pour les agiter, affirmant sa volonté de s’envoler. Robert consentit à lever le cache de ses yeux, il avait également senti la présence d’une proie dans les environs. Le flair digne de celui d’un Terrier, il sentait les petites pattes des musaraignes gratter la terre encore humide des pluies de tantôt, les sabots des chevreuils écrasant la tourbe près des marécages, le cuicui distinctif d’un pinson ou d’un rouge-gorge, le frémissement des oreilles pelucheuses d’un lièvre ou du renard qui ose sortir un bout de museau de son terrier. L’autour s’envola sans demander son reste, visant les branchages touffus d’un grand chêne. Il y percuta un petit écureuil qui tomba et lâcha une poignée de noisettes au passage, incapable de se raccrocher au tronc. Satisfait, Robert ramassa la petite bête inerte pour la fourrer dans l’une des poches. Ce n’était certes pas un sanglier ou un chevreuil mais il avait bien choisi son autour, assez vive pour être sensible à la moindre petite vibration.

L’oiseau avait disparu d’ailleurs, mais il ne s’en inquiéta pas. D’un coup de talon, il incita son cheval à une marche lente et tranquille. C’était les bois où il avait grandi et passé une grande partie de son existence, il en connaissait chaque chemin sur le bout des doigts et ils n’avaient que peu changé avec le temps. En s’avançant à travers une petite route caillouteuse, il finit par entrer à l’orée d’une vallée et il aperçut enfin Stannis qui l’attendait là. Debout, droit et fier comme il l’avait toujours été. Il avait été ramené à la vie à un âge visiblement plus avancé que celui de Robert, peut-être peu de temps avant sa mort.

Au début, il resta stupidement immobile sur son cheval, fixant son frère comme s’il était en face d’un fantôme – ce qui n’était pas tout à fait faux en soi. Puis Stannis ouvrit la bouche pour prononcer deux simples syllabes, celles de son prénom, et c’est là que Robert craqua complètement. Il descendit de son cheval, et ce fut pour se jeter sur son frère. Non pas pour le prendre dans une étreinte fraternelle et annonciatrice du pardon tant attendu, mais pour le prendre par le col. Il allait lui en coller une, à ce renégat.

« TOI ! »

Il lui hurle à la figure tel qu’il hurlerait une insulte, chargeant sur lui comme un taureau en furie. Les deux Baratheon tombent par terre tandis que Robert le rue de coups sans regarder où il frappe, sur le visage, sur le torse, sur les bras, parfois même sur la pauvre terre qui n’a rien demandé.

« Tu oses revenir à moi, me MANDER DE VENIR TE VOIR, après ce que tu as fait ? Tu as oublié qui tu étais ? Un traître, un meurtrier, un fratricide ! Tu sais que le châtiment pour avoir tué Renly, c’est la mort ? J’emmerde les Fidèles de Trios et je chie sur leur prophétie, je vais te renvoyer de l’Enfer d’où tu viens. »

Et il continue de le battre les yeux révulsés comme un fou, lâchant des « je vais te tuer, je vais te tuer ! » aléatoirement entre deux coups, comme un père alcoolique qui frappe son fils désobéissant. Ou comme un grand frère déçu qui ne peut plus contenir sa colère. Mais peut-il réellement aller jusqu’à reprendre cette vie qui lui a été rendue ? Il n’en était pas si sûr.
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Stannis Baratheon

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When it All Falls Down

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Un fantôme du passé.

Il y avait eu une certaine hésitation lorsqu’il avait vu l’apparition de son frère aîné sur sa monture. Tout deux étaient restés immobiles, se fixant comme si le temps avait eu un moment d’arrêt.

Aurait-il pu se souvenir de la dernière fois qu’il avait fait face à son frère ? Ce dernier était plus âgé et moins en forme que celui qui lui faisait face aujourd’hui. Il se souvenait du dernier affront qu’il lui avait fait subir en refusant sa proposition d’être sa main à la mort de Jon Arryn, préférant aller chercher Ned Stark dans le Nord.

Stannis avait quitté Port-réal alors même que Robert était en route pour Winterfell. Il avait commencé à rassembler son armée pour un possible affrontement. Car il connaissait la vérité. Jon Arryn, qui s’était associé à lui pour la tenue d’un royaume abandonné par son roi, avaient rassemblé les preuves de la réel origine des enfants issus du mariage de Robert et Cersei Lannister. Rien que des bâtards issus d’une relation incestueuse entre les jumeaux. C’était ce qui lui avait fait craindre que la mort de Jon Arryn y fût liée, empoisonné par celle qui avait fait pousser ses cornes sur la tête de son frère aîné.

Il n’avait assisté à rien de ce qui avait mené jusqu’à une mort déshonorante pour le roi des sept couronne. Le reste avait été si vite, Ned Stark avait donné sa vie pour tenter de supporter sa légitime ascension sur le trône.

Une couronne qu’il n’avait jamais voulue, il avait seulement respecté le destin que la vie avait mis devant lui, il avait seulement respecté son devoir envers ce royaume, envers ce frère aîné qui ne l’avait jamais assez aimé, mais qu’il avait tout de même espéré pouvoir venger.

Rien ne s’était pourtant passé comme prévu.

Son frère n’avait pas perdu de son tempérament de feu lorsqu’il le vit sauter de son cheval pour foncer sur lui. Stannis ne résista pas tellement lorsqu’il se jeta sur lui, sentant rapidement la terre dans son dos.

Il lui crachait ses mots au visage, les coups accompagnants chacun d’entre eux. Stannis ne semblait pourtant même pas avoir la volonté de résister à sa colère.

Chaque coup l’atteignait un peu plus que les accusations qu’il hurlait. Son visage était à présent en sang lorsque ses crimes passés avaient été remplacés par cette simple promesse, il allait le tuer ?

Peut-être était-ce qu’il méritait réellement ? La justice froide et sans juge ou jury. La douleur accompagnait ce poids sur son être tout entier lorsqu’il réussit enfin à relever les bras pour parer ces prochains coups. Il avait tourné la tête pour cracher le sang qu’il avait en bouche.

« Alors fait le, accomplit ton devoir et tue moi »

Accomplis ton devoir, pour une fois, aurait-il pu ajouter dans une autre vie. La seule certitude, pourtant, était qu’il n’avait jamais été un homme à supplier pour sa survie. Il était de ceux qui avançaient sur le champ de bataille la tête haute, sans jamais ployer le genou face à la mort. Il ne ployait d’ailleurs pas aisément le genou. On avait pu, jadis, dire de lui qu’il était fait de ce métal qui aurait cédé avant de plier. Et c’était sans doute avec raison.

Il avait été un roi brisé et aujourd’hui il était un homme brisé, poursuivit par les fantômes de son passé, le poids de ses erreurs passées. Il n’aurait pas pu les racheter, il pouvait seulement espérer trouver son véritable devoir à accomplir, trouver une manière de se retrouver.

Les coups, avaient-ils repris ? Il ne répliquait pas pourtant, il tentait seulement d’éviter certains de ces coups.

« Je n’ai pas besoin que tu me rappelles mes crimes, je suis devenu tout ça pour tenter de sauver ce royaume »

Stannis avait au moins retrouvé sa clarté d’esprit malgré son actuelle confusion. Il n’était plus manipulé pas une prêtresse rouge et une prophétie. Il avait la volonté de faire ce qu’il jugeait juste. Il avait pu prendre à nouveau la parole.

« Je suis navré pour Renly »Il avait tué son propre frère. Il se souvenait des cauchemars qui l’avaient accompagné après ce premier crime. Aujourd’hui, le poids était juste plus lourd« Shireen »Sa fille. Il revoyait les flammes dans son regard. Comment avait-il pu en arriver là ? La fatigue, le désespoir. Rien ne pourrait effacer ça« Tue moi, si tel est ton jugement, je l’accepte »Il fronça légèrement les sourcils, il pouvait encore et toujours sentir le goût âcre de son propre sang dans sa bouche« Je n’ai nulle envie de suivre une nouvelle prophétie »Pas après tout ce que la dernière lui avait coûté. Aujourd’hui, plus que jamais, il savait que ces prophéties étaient seulement remplies de mensonges et de cruautés.



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Il y a une fraction de seconde où Robert pense qu’il va le tuer. Il pourrait enserrer ses mains autour du cou de son frère et lutter péniblement pendant quelques minutes jusqu’à ce que ses forces le quittent, jusqu’à ce qu’il succombe à l’étouffement. Il a le dessus, il est le plus fort, il pourrait aller jusque là. Stannis voit peut-être le moment où son regard change, lorsqu’il pèse le pour et le contre de cette décision entre deux coups de poing dans son nez. Son cadet connaît déjà cet éclat de folie furieuse qui le traverse parfois, cette pulsion héréditaire, le fardeau qui venait avec le sang de leur grand-mère Rhaelle Targaryen mais jamais il n’en avait été la victime. Tuer un homme n’était pas un acte anodin, pourtant. Même le fait de sentir la vie de Rhaegar s’échapper sous ses coups de marteau avait laissé un goût d’amertume terne dans le fond de sa gorge. Il pourrait le tuer cent fois, mille fois, il ne parviendra jamais à en tirer la moindre satisfaction. La guerre était une chose bien moche. Ils étaient des soldats, des guerriers, et les fantômes des hommes tombés sous leur épée les hantent chaque nuit.

« Mais défends-toi espèce de lâche, BATS-TOI ! »

Hurle-t-il contre son visage, incapable de passer à l’acte et d’aller au bout de sa menace si Stannis ne lui rendait pas ses coups. Comment pouvait-il arracher la vie à un homme qui ne se défendait pas, qui demeurait gisant au sol à attendre que la mort vienne le cueillir ? Son frère lui souffle de faire son devoir, d’une voix lasse, presque agacée d’attendre le moment fatidique. Son comportement attise davantage la fureur et l’incrédulité de Robert, et sa décision est prise : il ne le tuera pas. Et puis quoi encore ? Si Stannis voulait vraiment mourir, il n’avait qu’à se tuer lui-même ! Son objectif était de le punir, pas de lui donner ce qu’il voulait sur un plateau d’or. En poussant un dernier cri de rage animal, il lâcha enfin son col ensanglanté et le repoussa d’un ultime coup de pied dans les côtes, avant de tomber à ses côtés, la main sur le rein droit parce qu’il s’était fait un point de côté en se précipitant.

Les voilà désormais, les deux frères Baratheon : les vêtements ruinés, essoufflés comme après un combat dans l’arène, dans toute leur gloire oragienne. On aurait presque pu les croire à un paisible pique-nique ou sortant d’une sieste sous le soleil, en les voyant ainsi, allongés dans l’herbe encore humides des pluies de hier, le visage tourné vers le ciel dissimulé par l’épais feuillage des hauts chênes. Puis on se rapprocherait et on verrait les deux hommes souillés par le sang, surtout au niveau du visage de l’un et du poing droit de l’autre et ainsi, la querelle deviendrait claire. Les prochaines paroles de Stannis lui font rouler des yeux jusque derrière ses orbites et il éclate d’un rire tonitruant, laissant éclater tout son mépris. Il comptait le torturer autrement, désormais, en se montrant méchant. Avec des piques placées là où ça fait mal. Comme lorsqu’ils étaient enfants et qu’ils se blessaient déjà l’un l’autre.

« Le royaume, le royaume… t’as que ce mot à la bouche, ma parole. » Il passa son bras derrière sa tête pour s’y appuyer et tourna la tête vers lui. Il utilisa sa main libre pour pointer un doigt accusateur sur lui, l’écrasant de tout son dédain de frère aîné qui sait mieux les choses que lui et dont il devrait prendre de la graine. Tous les cadets le connaissent, ce regard. « Fais pas ton petit numéro de bon samaritain avec moi. Tu t’en fous du royaume comme de ta première pute, tu penses qu’à toi et ta petite gloire personnelle. Si t’avais eu le courage tu m’aurais tué comme notre frère, t’aurais arraché la couronne de force de ma tête. Mais regarde-toi, tu peux même pas me regarder dans les yeux. »

Ah parlons-en, de Renly ! Stannis pouvait dire pardon tant qu’il voulait, les excuses n’allaient pas ramener leur petit frère comme par enchantement. Du moins jusqu’au jour ou un Fidèle de Trios sera assez ivre pour trouver amusante l’idée de le ramener à la vie, histoire de transformer Accalmie en bain de sang. Robert était quelque peu hypocrite dans ses reproches pourtant : il ne pouvait pas dire sans mentir qu’il avait montré un amour et une dévotion suffisante à Renly. Il n’avait pas été assez présent pour lui ni comme frère, ni comme père de substitution après la mort de leurs parents. Ils ne s’entendaient même pas comme des amis, plus comme des connaissances. Il lui avait donné Accalmie comme preuve d’estime et de confiance, comme si c’était suffisant pour rattraper des années de négligence. Ça ne l’était clairement pas, Renly ne s’était jamais gêné pour le lui faire comprendre.

« Tu comptes aussi t’excuser pour mon fils dont tu as usurpé le trône au mépris de mon testament ? Pour Ned ? Et pour tout le reste ? Ne gaspille pas ta salive. Tu m’emmerdes avec tes excuses. Tu es toujours désolé mais ça t’empêche pas de recommencer, comme quand on était gamins. »

Le rappel de sa nièce Shireen, une enfant si douce et généreuse qu’on avait du mal à croire qu’elle était de leur famille, lui glaça le sang un instant. L’idée d’imaginer la petite fille hurlant de douleur, pleurant pour son père et sa mère tandis que sa chair brûlait lentement lui était insupportable. Comment son frère avait-il pu devenir un tel monstre, sous l’impulsion d’une seule femme ?

« Tu mérites même pas que je te tues. Ça te ferait trop plaisir. Va-t-en donc à Port-Réal te battre pour ce foutu trône pour lequel tout le monde se déchire puisque c’est ce que tu as toujours voulu. » Voyant que Stannis ne bougeait pas, il se redressa en position assise et s’énerva de nouveau, ramassa un caillou au hasard et lui jeta contre le torse. « Va-t-en, je te dis ! Je ne te connais plus, tu n’es plus mon frère. »
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La fatalité l’avait écrasé au sol, se protégeant à peine des coups portés avec une rage démente de la part de son frère aîné. Stannis ne répondit pas à son accusation de lâcheté, il l’invitait seulement à remplir son devoir, à faire pleuvoir sur lui la justice qu’il semblait avoir décidé ici et maintenant. Maintenu au sol autant par son frère que par le poids de cette dépression nourris par cette culpabilité, il ne semblait prompt qu’à attendre cette mort.

La correction se terminait pourtant bien là lorsqu’il reçut un dernier coup de pied dans l’abdomen, se retrouvant à plusieurs pieds de son frère. La douleur enflammait une nouvelle fois son corps las tandis qu’il se relevait légèrement, ne serait-ce que pour se remettre assis. Son regard froid regardait ce frère sans le regarder dans les yeux.

Robert avait choisi une nouvelle méthode d’attaque, les mots, les insultes et les attaques à son honneur. Cette nouvelle véhémence avait au moins eu pour résultat de réveiller la fureur intérieure de Stannis Baratheon. Celle-là même qui s’était éteinte sous le poids de cette terrible culpabilité qui l’abattait à l’Aude de cette seconde vie.

Chaque mot était une nouvelle dague en plein de son cœur. Et tandis que la fureur brûlait silencieusement en lui, Stannis retrouvait ses mauvaises habitudes. Sa mâchoire se contractait dangereusement tandis qu’il grinçait un peu plus des dents à mesure que ses accusations plus fausses les unes que les autres entachaient ses motivations passées. Cette mâchoire était le point qui trahissait toujours ses états d’âme. Certains avaient même plaisanté à dire qu’il avait manqué de se briser la mâchoire le jour où Robert avait donné Accalmie à leur jeune frère, Renly.

Comme pour préparer sa propre réponse, Stannis était resté silencieux face aux accusations posées jusqu’à ce que ce frère lui jette cette dernière pierre en l’invitant à s’en aller de leur terre. Il n’était plus son frère ? Cela avait été la goutte de trop pour l’ancien Lord de Peyredragon. Et décrochant un peu plus sa mâchoire, il avait répondu avec une froideur contenue.

« Non »Stannis avait brièvement penché la tête tout en fermant les yeux, il n’aurait presque plus su par où commencer« J’accepte la responsabilité des crimes que j’ai pu commettre en laissant cette maudite femme entrer dans ma tête, mais je ne te laisserais pas bafouer ce qui reste de mon honneur en osant remettre en doute mes intentions et motivations »La mâchoire plus contracté que jamais, Stannis s’était relevé à cet instant, non sans mal mais avec la fierté et la force qui avait pu caractérisé sa vie passé.

« Je n’ai jamais voulu de ce trône, de cette couronne, mais c’était la lois, le trône me revenait de droit et c’était mon devoir de le prendre, de protéger ce royaume mis à feu et à sang par nos ennemis, tout comme il était de mon devoir de te venger, quand bien même tu ne m’as jamais respecté, te venger de cette maudite famille et de cette femme qui avait bien fait pousser des cornes sur ta tête, mon frère »Il pencha légèrement la tête« Te berces-tu encore d’illusion sur ton prétendu fils ? Jon Arryn s’était tourné vers moi lorsque tu étais trop occupé à faire la fête pour t’occuper de ton royaume, mais ta maudite femme a dû l’empoisonner avant que l’on ait les preuves nécessaires pour que tu acceptes enfin de voir la vérité, elle ne t’a donné que les bâtards abjects de son frère jumeau. Et tu évoques Ned Stark ? Il était un homme d’honneur, et il avait soutenu mon accession au trône, sa seule erreur a été de croire que les Lannister avaient le même honneur que lui, ce qui lui a coûté sa tête. Ton cher fils comme tu l’appelles, celui qui a ordonné son exécution »

L’homme était visiblement en souffrance, autant psychologique que physique« Tu parles de mes fautes, mais comme toujours, tu n’as même pas cherché à connaître l’entière vérité, tu as seulement voulu comprendre ce qui t’arrange »Inspirant longuement, il ne put retenir un léger grognement de douleur. Son visage portait les traces des coups et sans plus de mesure, il cracha à nouveau ce sang sur l’herbe qui s’étendait à ses pieds. Il avait dit ce qu’il avait à dire avec toute la froideur qui le caractérisait toujours. Il n’avait dit que la vérité, sans détour. L’homme avait toujours fait preuve de cette brutale honnêteté, sans y mettre les formes. Il n’avait jamais cherché à avoir l’attitude de vrai charmeur qui caractérisait son frère aîné. Lui ne cherchait jamais à se faire d’amis, il faisait seulement ce qu’il jugeait être son devoir, ce qu’il jugeait être la bonne chose à faire. Il ne lui aurait jamais laissé la chance de peindre de lui cette image d’un homme qui avait juste voulu arracher un pouvoir qui n’était pas sien.

« Alors, non, je ne quitterai pas Accalmie, ma place doit être ici ou seule la mort m’attend »



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