"My heart's on the run" Ft. Maegor & Aerea Targaryen

 — "My heart's on the run, heart's on the run
Can't hold the feelin', something's gonna happen
Something's gonna happen now
Can you almost see it from all of the believin' ?
Gotta make it happen now"



Aerea Targaryen avait vu ses quinze printemps il y avait deux lunes plus tôt. Deux lunes qu'elle avait vécu dans l'impatience la plus incertaine.
L'héritière du trône de fer avait l'impression que sa vie se résumait à attendre. Elle n'avait été qu'un bébé quand ses parents avaient attendu d'abord de pouvoir quitter les Terres de l'Ouest en sécurité. Elle avait été une fillette si jeune quand elle avait été séparé de sa mère pour sa sécurité. Sans le savoir, elle avait attendu d'être réunie avec sa mère et sa sœur.
Puis, elle avait été retrouvée et sa mère, la princesse Rhaena, avait été obligée d'épouser son oncle Maegor Targaryen, tandis que sa jumelle était envoyée à la Citadelle.
Depuis ces funestes évènements, Aerea avait vécu dans l'attente, pour la plus grande partie du temps. Elle se souvenait encore de l'époque où elle ne parvenait qu'à pleurer et trembler à la moindre bourrasque de vent. La vie en tant qu'héritière de Maegor Targaryen l'avait forcé à devenir un peu moins fragile pourtant.

Le royaume devait la voir comme une pathétique ombre au pied de ce père de substitution, lui si fort et cruel parfois alors qu'elle était délicate, fragile et craintive bien souvent.
Il y avait presque une décennie, Maegor Targaryen avait prouvé à ses ennemis que sa folie ne l'empêchait pas d'être redoutable, un homme à craindre et à respecter.
Son oncle, Jaehaerys avait été couronné à Accalmie et les seigneurs avaient commencé à tourner le dos au roi qui avait usurpé le père de la petite Aerea.
Elle ne se souvenait que trop bien comment sa mère l'avait fait sortir du Donjon Rouge à la hâte une nuit, comme elles avaient rejoint Songefeu pour s'envoler dans la nuit.
Mais cela n'avait guère servi.
Elle ne connaissait que très peu de détails sur ce qu'il s'était passé, seulement que son oncle Jaehaerys était mort de la main de Maegor. Que sa mère avait trouvé la mort elle aussi et qu'elle, elle avait été ramené au Donjon après que Maegor Targaryen ait passé tous ses ennemis par la lame de Feunoyr.

Sa mère et son oncle avaient été brûlé à Peyredragon, et depuis qu'elle s'était tenue aux côtés de cet homme si grand et si effrayant qu'elle avait à peine osé relever les yeux vers lui pour brûler sa mère, Aerea s'était demandé pourquoi il leur avait accordé cet hommage alors qu'il les avait tué.
Sa vie était plutôt solitaire depuis. Elle avait des leçons, par des septas mais également par des préceptrices aux accents exotiques qui lui enseignaient nombre de choses sur Valyria. Elle avait un haut valyrien assez bon même si elle le pratiquait très peu en définitive, était une bonne lectrice et savait compter avec excellence.
À la différence de bon nombre de Ladies, on avait insisté pour qu'elle perfectionne son tir à l'arc et qu'elle sache au moins manier la dague, bien qu'on lui apprit également à se battre à l'épée... Une calamité sans nom. Elle se faisait mettre à terre dans tous les souvenirs qu'elle pouvait compter et détestait devoir tenir ces armes à la main. Elle se demandait ce que pensait Maegor quand il l'observait parfois.

Car ce roi avec qui elle partageait le Donjon Rouge, qui avait fait d'elle son héritière et qui avait aussi tué ses parents et ses oncles n'était guère locace.
Depuis qu'elle était une petite orpheline, il avait eût l'air de tenir à dîner avec elle le soir mais d'aussi loin qu'elle se souvienne, Maegor desserrait rarement la mâchoire.
Parfois, il l'interrogeait vaguement sur telle ou telle leçon, tel ou tel évènement. De même, lorsqu'un tournoi avait lieu ou un banquet, elle se tenait à sa gauche en qualité d'héritière mais presque jamais ils n'échangeaient de paroles.
En fait, hormis pour cela et son titre, Aerea songeait qu'il avait presque l'air d'un fantôme dans sa vie.
Elle avait craint quand elle avait quitté l'âge de l'enfance et que son corps l'avait trahi en faisant d'elle une jeune fille, une femme même selon ses septas, qu'il ne la renvoie du Donjon Rouge, qu'il ne scelle pour elle un quelconque mariage mais elle avait eu beau guetter une telle chose, rien n'était jamais venue. De même, lorsqu'elle avait saigné pour la première fois à l'âge de trois et dix années et qu'elle en était presque devenue hystérique, elle avait craint de nouveau mais là encore, rien.
En fait, ses septas l'avaient même forcé à prendre du vin de songe pour la calmer et il lui semblait qu'elle s'était réveillé à plusieurs reprises pour voir le roi à son chevet. Mais elle avait certainement rêvé. Si ce n'était pas le cas, jamais il ne lui en parla.

Lorsque ses quinze ans avaient approché, Aerea avait appris qu'on parlait d'un tournoi en son honneur. Elle avait détesté apprendre cela, l'attention qu'on lui donnait, elle la détestait souvent. Elle n'était pas à l'aise avec les regards et les attentions, elle n'était pas à l'aise au milieu de ces gens qu'elle ne parvenait pas à cerner.
Souvent, elle regrettait de ne pas avoir sa sœur près d'elle. Sa jumelle... Si sa sœur avait été envoyée à Villevieille, elle la revoyait parfois quand elle allait la visiter ou qu'elle était autorisée à venir la voir au Donjon Rouge pour leurs anniversaires respectifs, elle avait également l'autorisation du roi d'entretenir avec elle une correspondance qui était un rayon d'air frais. Elle avait perdu le compte de lettres qu'elle gardait soigneusement dans son petit secrétaire.
Elle avait effectivement des ladies autour d'elle mais elle ne les appréciait pas plus que cela, elle n'avait aucun lien particulier avec elles.
Depuis qu'elle avait appris qu'il y aurait un tournoi pour son anniversaire cette année, Aerea n'avait eu de cesse d'y songer.
Chaque année, elle recevait un présent du roi Maegor. Des bijoux, une nouvelle robe, des livres. Quand elle était encore enfin, il lui offrait des jouets et des poupées. Quand elle avait eu dix années tout pile, il lui avait offert une dague qu'elle gardait dans un coffret sur son bureau et qu'elle ouvrait rarement.

Cette année, elle savait exactement ce qu'elle voulait. Elle n'avait simplement pas eu le courage de le demande jusqu'au matin exact de son anniversaire. Comme chaque année, elle avait pris le petit-déjeuner avec Maegor. Elle devait être assise depuis une bonne dizaine de minutes quand elle s'était entendu ouvrir la bouche, soudainement.

« I... I'd like something in particular for my nameday, this year... »

Pour éviter de triturer ses doigts, Aerea joue à la place avec la miche de pain qu'elle triture depuis ces dix minutes.

« I wish... I would like to have my sister back here... I mean... All the time... »

Elle savait de source sûre que le Septuaire n'était pas fait pour sa sœur. Elle était bien plus sauvage, bien plus robuste et plus sûre d'elle qu'Aerea ne l'était.
Combien de fois Villevieille se plaignait des frasques d'Aerea ? Et quand elle venait passer quelques jours ici, elle s'assurait toujours de retourner le paysage entier.

« Please... Set her free from the Septas, she... She doesn't fit there... And... I liked her here. »

En toute honnêteté, Aerea ne savait pas à quoi elle s'attendait. Elle ne savait pas vraiment ce qu'il se passerait quand elle ferait cette demande, mais il était trop tard pour faire machine arrière.

Pour sa plus grande surprise, sa requête avait été accepté finalement. Il avait fallu quelques temps d'organisation mais finalement, le convoi de sa sœur jumelle parvenait enfin au Donjon Rouge.
Maegor lui-même se tenait à ses côtés pour accueillir Rhaella aux portes du Donjon Rouge et Aerea laissait même un large sourire habiter son visage comme elle attendait impatiemment que sa sœur descende et qu'elle puisse la prendre dans ses bras.

“You don’t have to do this, Maegor,” avait prononcé la mère de son héritière quand il était venu de reconnaître que la rébellion prendrait fin, mettant un terme à tout ce à quoi Aenys avait cru un jour. “[i]Guess what, dear niece. I don’t but I want to,[i]” trouva-t-elle comme seule réponse de la bouche de son oncle Maegor avant qu’ils ne périssent un à un sous le coup brutal de son épée. Les traitres avaient été saigné puis donné aux chiens, une pratique courante pour le Seigneur des Sept Couronnes qui s’y adonnait volontiers. Seuls les Targaryen de sang avait mérité une mort propre et rapide puis un rite funéraire digne de la royauté que leur nom inspirait.

Depuis ce jour funeste, Maegor avait appliqué les préconisations les plus sûr. Il avait gardé la plus calme des deux filles de Rhaena, envoyant la gamine sauvage à la Foi pour la redresser un peu, à défaut de pouvoir la battre de quelques coups d’épée. Il s’était entouré d’un nouveau Conseil Restreint plus modéré dont certains étaient des pères de familles, s’assurant qu’ils emmènent femmes et enfants avec eux. Et année après année, la vie s’était construite ainsi entre eux.

Ils étaient silencieux la plupart du temps, mais cette condition satisfaisait Maegor. Il n’était pas du genre à parler pour ne rien dire, loin d’être aussi bavard que son frère aîné. Lorsqu’il avait été Main du Roi, le cadet d’Aenys avait été son bras armé et lorsqu’ils se retrouvaient pour échanger quelques paroles amicales, le prince de Peyredragon écoutaient majoritairement son frère parlé en secouant ses mains, ses grands yeux parme, brillants d’une excitation que le fils de Visenya ne semblait pas comprendre. Le Targaryen se montrait peu au côté de sa petite nièce, quoiqu’il en soit, craignant de briser un être aussi fragile. Il y avait quelque chose de frêle chez Aerea, une de ses choses qui aurait pu faire questionner son ascendance valyrienne si sa sœur jumelle n’était pas une véritable tornade humaine.

Alors que la jeune héritière avait atteint, ce jour-là, l’âge respectable de cinq et dix, ils avaient déjeuné ensemble. Il s’agissait là d’une espèce de point d’honneur que Maegor s’était forcé d’appliquer. Jamais il ne se serait permis de rater l’anniversaire de sa petite nièce et de ne pas s’asseoir à sa table, quand bien même ils n’avaient rien à se dire. Pourtant, alors qu’ils étaient assis depuis quelques minutes déjà, la petite Targaryenne ouvrit la bouche à la grande surprise du souverain.

“And what’s that? You never ask for anything.”

Habituellement, Maegor décidait de ce qu’il offrait à sa nièce, s’assurant avec l’aide de quelques conseillers que ces choses étaient adaptées à son âge. Il lui était important que son héritière ait reçu le meilleur et qu’elle eut connu quelques amies et partenaires de jeu, tant de choses qu’il n’avait pas connu à son âge. La reine Visenya, paix à son âme, avait été une femme autoritaire et stricte quoiqu’elle eût été une très bonne mère. Pourtant, son fils avait décidé que son héritière serait élevée différemment. Elle était une fille et il n’était pas exactement convenable de la forcer à combattre des hommes de deux fois son âge et six fois sa taille.

Plus encore, son, avis semblait important. Le Seigneur des Sept Couronnes avait refusé de la marier au premier venu et ce tournois semblait être le bon moment d’évoquer quelques possibilités ensemble. Peut-être trouveraient-ils un accord commun sur un guerrier efficace et prometteur dans les joutes ou quelque chose de ce genre. Pourtant, la demande que lui fit Aerea fut d’une toute autre nature et Maegor se coupa dans son geste tandis qu’il s’apprêtait à boire une gorgée de vin.

“No.”
La réponse avait été claire, nette et précise. Il était hors de question de libérer le petit animal qui pourrissait à Villevieille chez les Septas, à l’autre bout du Bief. Tout ce que Maegor entendait de cet enfant était un ennui constant qui lui causait bien plus de contact avec la foi que ce qu’il désirait. Quand elle passait quelque jour ici, sa présence contrastait drastiquement avec le calme et tranquillité de sa sœur jumelle, à un point tel que le souverain s’était fait un point d’honneur de ne la croiser qu’aux heures du souper. Rien ne saurait le faire changer d’avis, pensa-t-il, ferme sur ses positions.

Et puis Aerea s’était mise à argumenter de sa voix hésitante et tout ce que Maegor pu faire fut de l’écouter en pinçant l’arrête de son nez, reposant son verre de vin d’un geste presque brusque. Un soupire vaincu lui échappa, surpris lui-même d’avoir échoué à tenir bon. Il était incapable de refuser quoique ce soit à cette gamine, semblait-il et alors, le valyrien bougonna en chassant les paroles de sa nièce d’une main en reprenant la parole.

“Fucking hell. Fine, I don’t need a full-on argument on why. Write the bloody letter and if I find it convincing, you may have my permission.”

Quand il avait eu la lettre, Maegor avait fait semblant de la lire, tapotant son menton en suivant les lignes de mots qui ne voulaient rien dire à ses yeux. Il ne savait pas lire et quand bien même cela avait été le cas, le roi était connu pour avoir une patience assez limitée pour ce genre de chose. Il avait simplement apposé son sceau royal, décrétant que le voyage de Rhaella Targaryen soit réalisé le plus pressamment possible. Après cela, on n’avait guère trop vu le souverain se balader librement dans le Donjon Rouge avant la veille de l’arrivé de la jeune princesse. Il avait été plus bouillant encore que d’habitude, remonté et furieux quant à l’état du palais qui n’était pas différente de d’habitude.

Ses nerfs se calmèrent cependant le lendemain quand il fallut se tenir à la porte du Donjon Rouge. Au début, Maegor avait laissé entendre qu’il ne s’y rendrait pas, que cela ne l’intéressait pas et pourtant, il s’était tenu là dès le matin, ses bras croisés et un air renfrogné sur placardé sur le visage. Qui était-il pour abandonner sa nièce ici, seule et à la merci de tous les dangers ? La vérité était assez simple, lui qui n’avait jamais eu d’enfant s’était attaché à cette petite chose mutique et qu’importe ce qu’elle demandait, son oncle le lui accorderait, sûrement parce qu’il avait causé bien des malheurs dans sa vie et qu’il n’y avait plus que lui.

“You better not disappoint me, child. I trust you with this nonsense.” Commença Maegor en questionnant son choix. “Happy nameday.”